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qu’il peut ; marchandons tant qu’il nous plaira : rien n’est plus juste. Mais pour Dieu, renonçons à la déplorable habitude de nous croire exploités par ceux qui nous servent et de les traiter en inférieurs.

Lorsque Pierre prend son sucre et son café chez Paul, il se croit par cela même bien supérieur à lui. « C’est mon fournisseur ! » Soit ! il est ton fournisseur de denrées coloniales, mais tu es son fournisseur d’or et d’argent. L’or et l’argent sont des denrées coloniales aussi. La boutique a raison de croire qu’elle fait aller la fabrique ; l’industriel regarde à bon droit le marchand comme son obligé ; l’entrepreneur dit qu’il fait vivre ses ouvriers ; c’est vrai ; les ouvriers crient qu’ils font vivre les entrepreneurs ; c’est juste. Le domestique dit en parlant de son maître : Un homme que j’ai servi dix ans ! Le maître répond en parlant de son domestique : Un garçon que j’ai logé, nourri, habillé pendant dix ans ! Ils ne mentent ni l’un ni l’autre, mais ils ont tort d’oublier qu’ils ont reçu l’équivalent de leurs services et de traiter en débiteur celui qui les a payés.

L’échange de quantités égales ne saurait devenir une source d’inégalité.

Nous sommes tous égaux en droit, c’est-à-dire