Page:About - ABC du travailleur, 1868.djvu/117

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

temps, à ses nécessités les plus indispensables, sans rien échanger avec autrui. Certains sauvages vivent ainsi, sous un ciel privilégié, qui réduit presque à néant les besoins de l’homme. Ils sont chasseurs, pécheurs, constructeurs, cuisiniers, tailleurs et cordonniers pour leur usage personnel. Mais leur aptitude à tout faire leur interdit d’exceller en rien. Ils savent trop de métiers pour en pratiquer savamment un seul. Quand ils auront touché à tout pendant une journée, le produit de leur travail ne représentera pas la somme de biens utiles qu’un ouvrier anglais ou français crée en une heure de temps. Aussi courent-ils à l’échange, dès que la civilisation passe à leur portée : ils se hâtent d’offrir leurs produits pour obtenir les nôtres, et nous gagnons sur eux en leur vendant notre travail d’une heure contre leur travail d’un jour et plus.

Le simple bon sens vous explique la supériorité du travail civilisé sur le travail sauvage. La première condition pour produire beaucoup, vite et bien, est de se consacrer spécialement au métier qu’on fera le mieux. L’apprenti le mieux doué commence par être un pur maladroit ; avec le temps, l’application et la pratique, il arrive à tirer le meilleur parti possible de ses bras et de ses outils. Mais si nous cédions à l’ambition