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bargo sur une telle succession et de dire : « Cet argent, produit du travail, a été frauduleusement détourné par un homme qui ne travaillait pas ; je le prends et je l’envoie au secours de ceux qui travaillent. » La mendicité est-elle donc une industrie reconnue chez les peuples civilisés ?

Le mendiant enrichi peut répondre à cela : « Je n’ai rien pris ; on m’a tout donné. L’argent appartient-il à ceux qui le gagnent ? Ont-ils le droit d’en user et d’en abuser ? Peuvent-ils l’employer indifféremment à des œuvres utiles ou à des libéralités agréables et honorables ? Les cent mille francs que je possède m’ont été donnés sou par sou, à titre gratuit. Je n’ai pas eu recours à des manœuvres frauduleuses, je n’ai pas promis à mes bienfaiteurs de leur rendre le centuple de leurs aumônes : je me suis vêtu de haillons ; je me suis assis sur un escabeau et j’ai tendu la main ; la charité des bonnes âmes a fait le reste.

— Oui, mais la charité des bonnes âmes ne t’a donné tant de petits sous que parce qu’elle croyait soulager une véritable misère. Si tu avais seulement avoué mille francs de fortune, on ne t’en aurait pas jeté 99 000 autres. Parmi ceux qui l’ont enrichi, combien étaient et sont encore plus pauvres que toi ! Les haillons, l’escabeau, la main tendue, toute la mise en scène du paupérisme