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Maud crut alors remarquer sur le froid visage de Fredo les symptômes d’une fugitive émotion. Ce fut cependant d’un ton assuré qu’il répondit :

— Vous ai-je jamais trompée jusqu’ici, Miss ?

— Non, Monsieur… répondit vivement la pauvre Mary. Non… Et je puis, du moins, vous rendre cette justice que vous avez toujours tenu vos engagements. Et Harry sera bien libre en même temps que moi, n’est-ce pas ?

— Le même jour que vous, oui. Il vous attendra à Paris, dans un hôtel qu’on vous indiquera.

— Harry… Mon cher Harry… murmura la jeune fille dont le visage pâli était devenu tout rose d’espoir. Encore dix jours et je reverrai Harry… Dieu ! qu’ils vont me sembler longs, ces dix jours …

Fredo, à présent, semblait un peu nerveux.

— Vous n’avez plus rien à me dire, Miss ?

— Non, Monsieur. Je vous remercie…

Alors, sans rien ajouter, Fredo s’inclina et sortit, avec une sorte de hâte.


Dans la pièce adjacente, il y eut comme tout à l’heure un murmure de voix. Une porte s’ouvrit ensuite, et Maud distingua à l’autre extrémité du couloir la silhouette de Fredo qui, silencieusement, s’approcha d’elle et lui murmura à l’oreille :

Il serait prudent de rentrer dans votre chambre, car Julie ne tardera pas à sortir, et il ne faut pas qu’elle vous voie là.

La jeune femme fit de la tête un signe d’assentiment, et, doucement, rentra dans sa chambre dont Fredo, resté dans le-couloir, referma sans bruit la porte sur elle.

Quelques instants s’écoulèrent.

Puis, restée aux aguets près de la porte de sa chambre, Maud entendit quelqu’un sortir dans le couloir. Contenue, mais distincte, une voix de femme — celle de Julie — prononça :

— Tiens, vous êtes encore là, Monsieur ?…

— Je vous attendais… répondit la voix brève de Fredo. Encore deux mots à vous dire…

Une clé fut tournée dans une serrure. Alors, la voix de Fredo s’éleva de nouveau :

— Non… Laissez cette clé sur la porte. Il faudra que je remonte tout à l’heure…

Des pas s’éloignèrent en descendant un escalier. En bas, une porte s’ouvrit, se referma, Puis, plus rien, que le gémissement du vent dans le couloir.


CHAPITRE XVIII


Maud avait bien entendu :

— Laissez cette clé sur la porte, il faudra que je remonte tout à l’heure…

Et la gardienne de Miss Strawford n’était plus là. Plus personne dans pièce qui servait de corps de garde à la prison de la véritable Mary. Le chemin qui permettait de communiquer avec la prisonnière était libre.