Page:Abel Sibrès - Maud.djvu/5

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

MAUD[1]



CHAPITRE PREMIER


Mouzonville est une sous-préfecture qu’on trouve quelque part en Lorraine. Une de ces petites sous-préfectures où dans certaines rues l’apparition d’un passant est un événement, qui fait soulever par d’invisibles mains les rideaux des fenêtres. Au reste, ville assez coquette, et il existe encore de pittoresques vestiges moyenâgeux susceptibles d’intéresser les archéologues. Deux paroisses. Un collège de garçons, qui fut renommé, et un collège de filles.

La jeunesse masculine — et même féminine — s’y livre naturellement à tous les genres de sports, et Mouzonville s’enorgueillit d’un stade authentique, encore que plutôt exigu, situé le long du Mouzon, près de la vieille promenade des Marronniers.

Non loin de cette promenade, sur le flanc de la hauteur qui borde de ce côté la vallée du petit cours d’eau, se trouve une propriété où l’on accède par un chemin traversant la prairie. Propriété d’ailleurs modeste : un assez grand jardin, quelques arbres, le tout clôturé de murs, et, aux milieu, une maison d’un étage, toute simple, assez bien entretenue. Cette propriété est connue à Mouzonville sous le nom de Mon-Espoir.

Ainsi que toutes les choses terrestres, Mon-Espoir avait eu des avatars divers que nous regrettons de ne pouvoir conter, faute de temps et surtout de place. Qu’il suffise de savoir que sa situation à une distance relativement considérable de la ville, et surtout le mauvais état des chemins qui y conduisaient en rendaient la localisation assez difficile. Si bien qu’en dépit de la crise des logements à la fin de la guerre et même après, Mon-Espoir resta un certains temps inhabité.

Enfin, certain jour d’automne, un amateur se présenta chez Me Blazier, le notaire de la rue Neuve que le propriétaire de Mon-Espoir avait chargé de ses intérêts.

Cet amateur était étranger au pays. Il venait de Paris, mais se disait originaire du Nord, ainsi, du reste, que l’indiquait son nom suffisamment

  1. Voir les Prétendants de Miss Strawford, no 133 de la collection des « Romans populaires ».