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sais bien que tu connais tout cela beaucoup mieux que moi-même, mais j’ai voulu te le rappeler parce que la mention en profite à ceux qui croient que la Trinité est Dieu. Réveille-toi donc du sommeil de l’insouciance et réponds à ma lettre par ton arrivée chez moi. Un homme comme toi n’a pas besoin de maître. Salut.

Quelques détails biographiques sur le prince des croyants Aboû Fâris ‘Abd Al Azîz, que Dieu le protège. C’est lui qui a inauguré parmi ses sujets le règne de la justice en les gouvernant selon le Livre[1] et la Sounna[2].

Parmi ses belles qualités, citons son habitude d’honorer les savants et les hommes pieux et de les traiter en sa présence avec le plus grand respect. Il honora aussi profondément les schérifs, les descendants de notre prophète. Il leur prodigua des dons si considérables qu’ils accoururent de tous les points de la terre, de l’Orient et de l’Occident. À tous ceux d’entre eux qui s’établirent dans son pays, il accorda des émoluments, des revenus et des vêtements d’honneur. Ceux qui ne faisaient que passer furent reçus avec de grands honneurs et comblés de présents. Il avait assigné chaque année soixante dînârs qu’il remettait à ceux qui venaient le visiter dans la nuit du Moulad[3], pour les dépenser en festins et rendre joyeuse par là la fête du Moulad (cet argent était pris sur les revenus de la douane), sans compter les parfums, l’eau de rose et l’encens dont ce don magnifique était accompagné.

Quant à sa justice en faveur de quiconque était victime d’un oppresseur, quel qu’il fût, elle était si connue que ses gouverneurs et ses officiers se hâtèrent de suivre son exemple et s’abstinrent de toute iniquité et de toute exaction. Du reste le sultan accueillait toutes les plaintes qu’on portait contre ses magistrats.

Il tirait son entretien, celui des membres de sa famille, leurs vêtements et autres besoins légitimes des impôts sur les chrétiens et des

  1. Le Korân.
  2. La tradition orale, que l’on peut comparer avec le Talmud, avec cette différence toutefois que dans la Sounna tout se rapporte à des paroles ou à des enseignements attribués au prophète. Le premier qui recueillit et réunit les diverses traditions, fût Mâlik ibn Anas, mort l’an 179.
  3. Fête instituée en l’honneur de la naissance du prophète et célébrée chaque année le 12 du mois Rabi‘I (troisième mois du calendrier arabe). Pour les Musulmans tunisiens, c’est la plus grande fête de l’année. La célébration solennelle en remonte probablement à Abou Fâris.