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Tiens tiens dit un manant dans la foule, voilà la belle Maurever que l’homme de Fer a juré qu’elle serait sa femme !

La tête de Marcou se releva. Il chercha des yeux le parleur.

… Après ! répliqua un Normand, ce n’est qu’une Bretonne… l’homme à la barbe bleue en a épousé de plus nobles et de plus belles !

— Tu en as menti, toi ! râla Marcou furieux.

Par une secousse désespérée, il arracha la barre des mains de Gabillou. Les deux camps rivaux, comme cela arrive invariablement, saisis à l’improviste par le contre-coup, tombèrent pêle-mêle dans la poussière.

Marcou seul se dressa sur ses pieds. Un démon ! Il brandit la lourde barre qui s’échappa de sa main en sifflant, et alla fracasser le crâne du Normand qui avait dit : l’Homme à la barbe bleue en a épousé de plus nobles et de plus belles.

Partie nulle ! grenouille manquée ! il faut en effet tenir la barre à la main jusqu’à ce que les deux camps se soient relevés. C’est la règle. La raison ? Les règles se moquent toutes de la raison. Elles n’ont pas tort. On emporta le Normand à la tête cassée, on emporta Gabillou qui était sans connaissance. Marcou alla boire et l’on recommença une nouvelle grenouille.

Haïdur !

La plaine, cependant, des deux côtés du Couesnon, s’emplissait de cavaliers. C’était l’heure de la fête noble. Français et Bretons venaient étaler leurs belles armures aux rayons du soleil couchant. Autre façon de lutter.

Entre voisins on ne fait que cela.

Parmi les cavalcades qui manœuvraient à droite et à gauche de la rivière, trois surtout étaient fort remarquables. Deux sur la rive droite : en Normandie ; une sur la rive gauche : en Bretagne.

La première se composait de chevaliers français. Par tous pays, elle eût été illustre et brillante. Les noms y resplendissaient bien plus encore que les armures.

C’étaient, du reste, presque tous les nouveaux titulaires de l’ordre de Saint-Michel : le duc de Guyenne, le duc de Bourbon,