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c’étaient surtout des réunions littéraires, où l’on voyait la duchesse de Lauzun, Delille et Lemierre(l). A onze heures, la politique occupait les invités, après que les domestiques avaient disparu et que les portes étaient fermées. Quelques députés s’y essayèrent, y lurent les discours qu’ils devaient prononcer à la Constituante. Le salon de madame Necker, devenu réactionnaire à cause de sa modération, cessa ses réunions après le 10 août 1792, et la plupart des gens qui l’avaient fréquenté se lancèrent dans le mouvement^ soit à gauche, soit à droite, jouèrent de la Révolution ou en moururent.

Protectrice des savants et des artistes, madame Necker fonda un hospice qui porte son nom. Elle eut sa place parmi les publicistes, écrivit des Réflexions sur le divorce et des Mélanges, et contribua à faire réformer les abus qui s’étaient introduits dans les prisons et les hôpitaux. Elle suivit, en Suisse^ son mari que les Jacobins avaient attaqué.

En 1789 encore, le salon de Deauharnais fut très fréquenté- On y adoptait, modérément, les idées nouvelles. « L’Égalité et la Liberté y présidaient, a écrit Dorat-Cubières ; la Liberté et l’Égalité sont les dames d’atour de madame de Beauharnais w. Parmi les habitués, citons Dorât, Colardeau, Grébillon, Dusaulx, Cailhava (2), Bailly, Mably, et même le sauvage Jean-Jacques Rousseau. Chez Montmorin et les divers ministres, comme chez Necker, chez la duchesse d’Aiguillon, mesdames de Beaumont et de Sérilly, toutes les illustrations de la France se coudoyaient (3). La Société aristocratique fréquenta surtout les salons de mesdames de Foix, d’Hénin, de Simiane, de Vaudreuil, et de quelques magistrats. Dans le salon de madame Panckoucke, rendez-vous des auteurs les plus distingués de la fin du dix-huitième siècle, salon tout littéraire d’abord, car le mari de cette femme était imprimeur-libraire, propriétaire du Mercure de France, la politique s’introduisit quand Panckoucke lit paraître le Moniteur universel. Barère de Vieuzac y amena l’élément révolutionnaire, qui céda bientôt à l’influence des modérés. Les dîners de madame Panckoucke étaient renommés (1) Mort à Saînt-Geriuaiu-en-Laye, en 1793.

(2) Auteur de la Descenu de Bonaparte en Éqtjpte. Mort en 18i ;j. ( ;j) Gliatcaubriand ; Mémoires d’ Outre-Tombe, t. II, p. 95.