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primaires ». Elle rappela au ministère Roland, Clavière et Servan ; elle donna le portefeuille de la marine à Monge, celui des affaires étrangères à Lebrun, celui de la justice à Danton. Elle introduisit le vote universel à deux degrés d’élection.

Voilà ce que les Feuillants avaient amené, à rencontre de leurs projets. Ils étaient absorbés par les Girondins et par les Jacobins. « Les sots feuillantins, sur le moule d’enfantin, croient que le peuple va les dévorer. Comme ils ont tous conspiré contre lui, avec leur barbare modérantisme, et que les signataires contre Pétion sont vus de très mauvais œil, ils ont peur(l). » Telle est la remarque d’une contemporaine.

Le 2 septembre 1792, la section Grange-Batelière (ou Mirabeau) arrêta qu’il fallait faire marcher avec les volontaires parisiens les citoyens ayant assisté aux « Clubs monarchique, des Feuillants, de la Sainte-Chapelle. » On devait les placer entre des patriotes chargés de les surveiller (2).

C’en était fait de la « faction feuillantine. » Si on ne la persécutait pas, on s’en méfiait complètement. La Fayette avait prolesté contre le 10 août, avait songé à soulever, en faveur de Louis XVI, l’armée et les départements ; puis, voyant son plan découvert, il avait abandonné ses troupes et s’était dirigé incognito vers la Hollande. Le 21 septembre 1792, les Jacobins décidèrent que le titre de Société des Amis de la Constitution serait changé en celui de Société des Jacobins, Arnis de l’égalité et de la liberté. En effet, depuis ce jour, le journal du Club porta cette inscription.

Lorsque la Convention proclama la République, toute idée de royauté constitutionnelle devint une attaque contre la souveraineté du peuple, et les Feuillants, qui s’en tenaient encore à la Constitution de 1791, n’en furent pas moins exposés, quoiqu’ils fussent des individualités effacées pour la plupart, à de graves suspicions. Les républicains virent en eux des conspirateurs, capables d’étouffer leurs anciens sentiments libéraux, s’il en était besoin, pour profiter des crises politiques afin de revenir aux prétentions de la bourgeoisie dirigeante. Beaucoup payèrent de leur tète leur influence passée ; beaucoup aussi tergiversèrent pendant nombre d’années, et, finalement, apostasièrent.

Après la journée du 10 août 1793, et la conduite de La Fayette (1) Ed. Lockroy, Journal d’un Bourgeois pendant la Révolution, p. 300. Lettre du 6 septembre 1792.

(2) Registres des sections parisiennes pendant les premières Journées de septembre 1793. Cité par Mortimer Tcrnaux, Histoire de la Terreur, t. III, p. 476.