Page:A. Bret, La belle alsacienne , ou Telle mère telle fille, 1923.djvu/137

Cette page a été validée par deux contributeurs.
128
LA BELLE ALSACIENNE

Un plaisir, que je n’avais ni prévu ni désiré, vint s’emparer de mes sens ; mon cœur, habituellement susceptible des impressions de la volupté, succombe machinalement à la force insurmontable du penchant qui m’entraînait ; j’oubliai toute ma gravité, mes yeux se troublèrent ; un long égarement suspendant toutes les facultés de mon âme semblait m’avoir enlevée à moi-même : je ne revins de ce désordre que pour m’y replonger de nouveau ; et lorsque l’illusion fut dissipée, j’eus peine à croire que ce qui venait de se passer ne fût pas l’effet d’un songe. Je crois que cela peut s’appeler une surprise de tempérament.

Quelque peu de sujet qu’eût mon fier vainqueur de se féliciter de ses progrès, il me parut cependant que mes bontés, quoique involontaires, chatouillaient son amour-propre ; car de quoi notre misérable vanité ne tire-t-elle pas avantage ! Enflé du prix que la sensualité avait accordé par instinct aux efforts qu’il venait de faire pour l’émouvoir, il prit tous les airs d’un