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LA BELLE ALSACIENNE


la conversation de son Orphée ; je restai seule en proie aux politesses subalternes du danseur.

Il débuta d’abord par un étalage de sentiments estropiés, le long détail de ses bonnes fortunes ; je fus régalée de l’énumération des jolies femmes qui avaient bien voulu se ruiner pour acheter le plaisir d’être déshonorées par un homme si charmant et qui ne menaçait pas moins que de faire une irruption dans les chœurs de l’Opéra… Il me fit ensuite une tendre déclaration de son amour, se précipita à mes genoux en héros de théâtre, m’assura d’une fidélité éternelle, en appuyant adroitement sur le sacrifice qu’il allait faire à mes appas des plus aimables femmes de Paris.

Qu’un homme est ridicule lorsqu’il veut nous toucher et que l’aveu de notre cœur se refuse à l’illusion !

J’écoutais ses protestations d’un air nonchalant, ne répondant que par monosyllabes, et fort embarrassée de ce torrent de galanterie qui me faisait soulever le cœur.