Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/200

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Rashleigh ; le ciel vous récompense du bien que vous avez fait, et vous pardonne le mal que vous avez voulu faire !

— Amen ! ma jolie cousine, » reprit-il d’un air contrit, qu’il avait pris, je crois, au séminaire de Saint-Omer. « Heureux celui dont les bonnes intentions ont porté des fruits, et dont les mauvaises pensées sont mortes en fleur ! »

Il partit on prononçant ces mots. « Le parfait hypocrite ! me dit miss Vernon quand la porte se fut fermée sur lui… Combien ce que nous méprisons, ce que nous détestons le plus, peut ressembler par l’extérieur à ce que nous vénérons le plus profondément ! »

J’avais chargé Rashleigh d’une lettre pour mon père, et aussi de quelques mots pour Owen, outre la lettre dont j’ai déjà parlé, et que j’avais jugé plus sûr de faire parvenir par une autre voie. Dans ces épîtres, il eût été naturel de faire connaître à mon père et à mon ami que j’étais dans une position à ne me former que dans l’art de la chasse et de la fauconnerie, et à oublier au milieu des palefreniers et des valets d’écurie les connaissances ou les bonnes manières que j’avais acquises. J’aurais dû aussi leur dire quel dégoût et quel ennui j’éprouvais au milieu d’êtres qui ne s’occupaient que de la chasse ou de passe-temps encore moins relevés ; me plaindre des habitudes d’intempérance de la famille où je vivais, de la peine, de la mauvaise humeur même avec laquelle sir Hildebrand voyait ma sobriété. Ce dernier point aurait aisément alarmé mon père, homme d’une grande tempérance ; et lui en parler, c’eût été certainement m’ouvrir les portes de ma prison et abréger mon exil, ou au moins amener un changement de résidence.

Je dis donc, mon cher Tresham, qu’en considérant combien un séjour prolongé à Osbaldistone-Hall était désagréable pour un jeune homme de mon âge et de mes habitudes, il eût paru naturel que je fisse sentir à mon père tous ces inconvénients, pour obtenir de quitter la maison de mon oncle. Et cependant il est certain que je n’en dis pas un seul mot dans mes lettres à mon père et à Owen. Osbaldistone-Hall eût été Athènes dans son anciennes splendeur littéraire, habitée par ses sages, ses poètes et ses héros, que je n’aurais pas montré moins de disposition à le quitter.

Si vous avez conservé quelque chose du feu de la jeunesse, Tresham, mon silence vous paraîtra facile à expliquer. La beauté