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épées traînant sur le carreau. Des cottes de mailles ou de buffle formaient la plus grande partie de leur habillement, et des casques, de fer, ou des chapeaux à larges bords, rabattus avec des plumes retombant par derrière à la façon espagnole, étaient leur parure.

Le baron d’Avenel avait une de ces hautes et martiales statures que Salvator Rosa se plaît à représenter. Il avait un manteau qui jadis avait été magnifiquement brodé, mais qui, porté depuis longtemps et toujours exposé aux injures de l’air, avait perdu l’éclat de sa couleur. Ce manteau, jeté négligemment sur sa haute taille, couvrait en partie un doublet de buffle, et laissait parfois apercevoir une chemise de mailles de fer, nommé secret, dont il se revêtait au lieu d’une armure plus ostensible pour se mettre en garde contre toute tentative d’assassinat. Une ceinture de cuir soutenait, d’un côté, une large et pesante épée, et de l’autre, le beau poignard qui avait appartenu à sir Piercy Shafton, et dont les ornements et la dorure étaient déjà fort effacés soit par le rude usage qu’on en avait fait, soit par le peu de soin qu’on en avait pris.

Malgré la rudesse de son aspect, les manières et le maintien de Julien Avenel avaient plus de dignité que ceux des gens qui l’entouraient. Il pouvait avoir cinquante ans et même davantage, car ses cheveux noirs étaient entremêlés de cheveux gris ; mais son âge n’avait éteint ni le feu de son œil ni l’impétuosité de son caractère. Son visage avait été beau, car la beauté était un des attributs de sa famille ; mais ses traits étaient altérés par la fatigue, par le hâle, et l’habitude des passions violentes avait durci l’expression de ses traits.

Il semblait plongé dans un abîme de sombres réflexions, et à une certaine distance de ses subordonnés, il arpentait à grands pas le haut de la salle, s’arrêtait de temps à autre pour prodiguer ses caresses et donner quelque nourriture à un faucon femelle qu’il tenait au poing, attaché avec ses jesses ou courroies. Cet oiseau ne paraissait pas insensible à de telles attentions, car il y répondait en agitant ses plumes et en becquetant avec complaisance la main de son maître. Alors, par intervalle, le baron souriait, mais c’était pour retomber un instant après dans la rêverie la plus noire. Il ne daignait pas même jeter les yeux sur un objet que tout autre homme n’eût pu s’empêcher d’honorer d’un regard d’admiration.

C’était une femme d’une beauté remarquable, moins richement qu’élégamment vêtue, assise sur un siège bas près de la vaste cheminée. La chaîne, les bracelets d’or dont son col et ses bras étaient