Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/551

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« Tu mens, traître ! répondit Allan d’un ton furieux ; tu mens en cela comme dans tout ce que tu m’as dit ; ta vie n’est qu’un mensonge. — Si je ne vous avais pas exprimé ma pensée en vous traitant de fou, répondit Menteith avec indignation, votre vie ne serait pas de longue durée ; mais en quoi m’accusez-vous de vous avoir trompé ? — Vous m’avez dit que vous n’épouseriez jamais Annette Lyle ! c’était une fausseté ! une trahison ! elle vous attend à l’autel ! — C’est vous-même qui mentez, répondit Menteith ; je vous ai dit que l’obscurité de sa naissance était la seule barrière entre elle et moi : cet obstacle a été levé, pourquoi renoncerais-je à mes prétentions en votre faveur ? — Défendez-vous donc ! cria Mac-Aulay ; nous nous sommes suffisamment expliqués. — Pas à présent, pas ici, Allan : vous devez me connaître ; attendez à demain, nous nous reverrons. — Aujourd’hui même ; à l’instant ou jamais, répondit Allan : l’heure de votre triomphe est passée. Menteith, je vous en conjure au nom de notre parenté, de nos combats, de nos travaux communs, tirez votre épée et défendez votre vie ! »

En parlant ainsi il saisit la main du comte et la serra avec tant de fureur, que le sang en jaillit. Menteith le repoussa violemment.

« Retirez-vous, insensé ! lui dit-il. — Eh bien donc, s’écria Allan, que ma vision s’accomplisse ! » et tirant son poignard, il en frappa le sein du comte ; mais la cuirasse fit glisser la pointe du poignard, et au lieu d’être frappé au cœur, il reçut une blessure entre le cou et l’épaule ; néanmoins il fut renversé. Montrose entrait en ce moment. Chacun était surpris et effrayé. Mais avant que Montrose eût eu le temps de voir ce dont il s’agissait, Allan s’élança dehors, et descendit l’escalier du château avec la rapidité de l’éclair.

« Gardes ! s’écria Montrose, fermez les portes ! qu’on s’empare de sa personne ! qu’on le tue s’il résiste ! Fût-il mon frère, il mourra !

Mais Allan renversa d’un second coup de poignard la sentinelle qui était en faction, traversa le camp avec la vitesse d’un daim des montagnes, se jeta dans la rivière, la passa à la nage, et, atteignant l’autre côté du rivage, disparut bientôt dans les bois. Dans le courant de la même soirée, son frère Angus et ses vassaux quittèrent le camp de Montrose, et, reprenant le chemin des montagnes, abandonnèrent ses drapeaux.

On dit qu’Allan, peu de temps après son crime, parut subite-