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XC
Albertus un instant crut voir sa vénitienne
— La coiffure bizarre ornée à l’italienne
De grosses boules d’or et de sequins percés,
Le collier de corail, la croix et l’amulette,
Les touffes de rubans et toute la toilette ;
La peau couleur d’orange, aux tons chauds et foncés,
L’expression rêveuse et l’attitude molle,
Le regard tout pareil et la même parole :
Elle lui ressemblait à faire illusion.
— Connaissant Albertus et son humeur fantasque,
La sorcière avait cru devoir prendre ce masque
Pour contenter sa passion.


XCI
Véronique sonna. — La portière dorée
S’entr’ouvrit. — Revêtu d’une riche livrée,
Un petit page entra qui portait des plateaux,
— Un vrai page flamand, tête blonde et rosée,
Comme celle qu’on voit au terburg du musée.
— Il posa sur la table et flacons et gâteaux,
Plaça l’argenterie, et la vaisselle plate,
Versa de haut le vin dans les verres à patte,
Salua nos galants et puis s’éloigna d’eux.
— C’était un vin du Rhin dont la robe vermeille
Jaunissait de vieillesse, un vin mis en bouteille
Au moins depuis un siècle-ou deux !