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Je revenais, ſeigneur : un grand peuple aſſemblé
M’attire par ſes cris, par un bruit redoublé.
Par le ſens de l’oracle Érixène trompée,
Du ſoin de ſe venger toujours plus occupée,
De l’intérêt des dieux prétextant ſon courroux,
Tâchait de ſoulever vos ſujets contre vous ;
De tout par Égéſippe encor plus mal inſtruite,
À vos ſujets tremblants révélait votre fuite ;
Leur diſait que le ciel, pour unique ſecours,
Attachait leur ſalut à la fin de vos jours.
Pour eux, par leurs regrets, du grand Idoménée
Contents de déplorer la triſte deſtinée,
Ils ſemblaient ſeuls frappés par l’arrêt du deſtin.
Égéſippe a voulu les exciter en vain.
Pour moi, qui frémiſſais de tant de perfidie,
Je le pourſuis, l’atteins, & le laiſſe ſans vie,
Déſabuse le peuple, et, content déſormais,
J’ai ramené, ſeigneur, la princeſſe au palais.

I D O M É N É E.

Sujets infortunés, qu’en mon cœur je déplore,
Au milieu de vos maux me plaignez-vous encore ?
Ce qui m’aime à ſa perte eſt par moi ſeul livré,
Et tout ce qui m’eſt cher contre moi conjuré !
Cruel à notre tour, qu’Idamante périſſe ;
De celui d’Érixène augmentons ſon ſupplice ;