Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome premier, 1750.djvu/187

Cette page n’a pas encore été corrigée

Aurais-je prétendu, né d’un ſang odieux,
Vous être plus ſacré que n’ont été les dieux ?
À travers les détours de votre âme parjure,
J’entrevois des horreurs dont frémit la nature.
Dans la juſte fureur dont mon cœur eſt épris…
Mais non, je me ſouviens que je fus votre fils.
Malgré vos cruautés, & malgré ma colère,
Je crois encore ici m’adreſſer à mon père.
Quoique trop aſſuré de ne point l’attendrir,
Je ſens bien que du moins je ne dois point l’aigrir,
Dans l’eſpoir que ma mort pourra vous ſatisfaire,
Que vous épargnerez votre malheureux frère.
Le crime ſupposé qu’on m’impute aujourd’hui,
Tout, juſqu’à ſon départ, eſt un ſecret pour lui.
Sur la foi d’une paix ſi ſaintement jurée,
Il ſe croit ſans péril entre les mains d’Atrée :
J’ai pénétré moi ſeul au fond de votre cœur ;
Et mon malheureux père eſt encor dans l’erreur.
Je ne vous parle point d’une jeune princeſſe ;
À la faire périr rien ne vous intéreſſe.

A T R É E.

Va, tu prétends en vain t’éclaircir de leur ſort ;
Meurs dans ce doute affreux, plus cruel que la mort.
De leur ſort aux enfers va chercher qui t’inſtruise.
Où l’on doit l’immoler, gardes, qu’on le conduiſe,