Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome V.djvu/506

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lier de chacune des passions que la musique est capable d’exciter en l’âme ; et si cela était, je montrerais quels sont les degrés, les consonances, les temps, les figures, et choses semblables, qui les peuvent exciter en nous ; mais ce serait aller au-delà du dessein que je me suis proposé de ne faire ici qu’un abrégé.

J’aperçois terre enfin, et je me hâte pour gagner le rivage ; j’avoue que j’ai omis ici plusieurs choses par le désir que j’ai eu d’être court ; que le défaut de mémoire m’en a aussi fait omettre plusieurs, mais que j’en ai omis bien davantage par ignorance. Je veux bien néanmoins que cet avorton de mon esprit, semblable, par le peu de politesse qu’il a, aux petits ourseaux qui ne font que de naître, vous aille trouver pour être un témoignage de notre familiarité et un gage certain de l’affection particulière que j’ai pour vous ; mais à condition, s’il vous plaît, que, l’ayant enseveli parmi vos pancartes dans un coin de votre cabinet, il ne souffre jamais la censure et le jugement d’autres que de vous : car il serait à craindre que ces personnes n’eussent pas, comme vous, assez de bienveillance pour moi, que de vouloir bien détourner leurs yeux de dessus ce tronc informe, pour les porter sur des pièces plus achevées, et où je pense, sans flatterie, avoir donné quelques marques et témoignages de mon esprit ; et elles ne