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162 ŒUVRES

force de prieres, et demanday un de mes nouveaux Thomistes 1 . Il fut ravy de me revoir ; Et bien mon Pere, luy dis-je, ce n’est pas assez que tous les hommes ayent un pouvoir prochain, par lequel pourtant ils n’agissent en effet jamais, il faut qu’ils ayent encore une grace suffisante, avec laquelle ils agissent aussi peu. N’est-ce pas là l’opinion de vostre Escole? Ouy, dit le bon Pere : Et je l’ay bien dit ce matin en Sorbonne, j’y ay parlé toute ma demy-heure, et sans le sable 2 j’eusse bien fait changer ce malheureux proverbe qui court desja dans Paris, il opine du bonnet comme un Moine en Sorbonne 2 . Et que voulez-vous dire par votre demy-heure et par vostre sable, luy repondis-je ? Taille-t’on vos avis à une certaine mesure ? Ouy, me dit-il, depuis quelques jours. Et vous oblige-t’on de parler demy-heure ? Non. On parle aussi peu qu’on veut. Mais non pas tant que l’on veut, luy dis-je ? la bonne regle pour les ignorans ! ô l’honneste pretexte pour ceux qui n’ont rien de bon à dire ! Mais enfin, mon Pere, cette grace donnée à tous les hommes est suffisante? Ouy, dit-il. Et neantmoins elle n’a nul effet sans grace efficace? Cela est vray, dit-il. Et tous les hommes ont la suffisante continuay-je, et tous n’ont pas l’efficace? Il est vray, dit-il. C’est à dire, luy

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1. W. illum ipsum quem nuper.

2. La seconde note de Nicole est « Sur le sable ». Sur cette question, cf. supra p. 152.

3. Cette phrase a été inspirée à Pascal par un passage des Considérations.... d’Arnauld, cf. infra p. 197.