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despotiques. Il pense, ainsi que moi, que ces constitutions le repoussent invinciblement. Duclos dans ses considérations sur les mœurs, avait déjà jeté quelques notions lumineuses, sur ce point.

L’état monarchique est donc le seul, qui appelle le préjugé. Écoutons ici M. de. Robespierre lui-même :

« Quels sont les lieux où il domine ?…, jusqu’à scélérat flétri par la société. »[1]

Les idées de ce morceau sur l’honneur ne sont pas neuves ; elles sont dans Montesquieu et Duclos, mais elles sont rassemblées avec justesse et écrites avec élégance.

Il me semble que l’auteur en traçant avec soin sa définition de l’honneur, ne s’est pas assez occupé de l’application de ces idées à son sujet. Il me paraît, qu’en apercevant fort bien que le préjugé ne pouvait naître que dans une monarchie, il ne dit ni comment, ni pourquoi. Il observe qu’il faut un état gouverné par l’honneur, pour admettre le préjugé ; il dit ce que c’est que l’honneur. Mais comment l’honneur a-t-il été amené à établir, à adopter ce préjugé ? On voit qu’il faut ici d’autres causes ; et on les trouve, ce me semble, dans les premières mœurs de la nation, qui a fondé la monarchie française.

On est surpris que l’auteur, après avoir si bien examiné toutes les parties de son sujet, et lors même que ses recherches tournaient son esprit vers les premiers tems de notre nation, n’ait pas aperçu que le système des compositions, qui a si longtems duré en Europe, est la source la plus aparente, pour ne rien dire de plus, de notre préjugé.

Je me permettrai encore d’observer une autre omission, dans cette première partie du discours de M. de Robespierre ; en traitant de l’origine du préjugé, il me semble qu’il fallait fixer ses principaux caractères. Or, le plus bizarre qu’il offre, est de ne pas étendre ses rigueurs sur les grandes familles. C’est encore là une recherche importante. M. de Robespierre aurait pu trouver les causes de cette contradiction, non pas dans les idées générales que nous avons des monarchies, où des lois fixes tempèrent l’autorité absolue, mais dans cette inégalité de rangs et de prérogatives, qui caractérisent la monarchie française.

  1. Nous n’avons pas réimprimé les passages cités par Lacretelle ; nous renvoyons à l’édition de 1785.