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toute votre âme, de tout votre cœur, de toute l’énergie de votre amour ?

Sabot suait de l’effort de sa pensée. Il répondit :

— Non. Oh non, m’sieu l’curé. J’aime l’bon Dieu autant que j’peux. Ça — oui — j’l’aime bien. Dire que j’aime point m’s’éfants, non : j’peux pas. Dire que s’il fallait choisir entre eux et l’bon Dieu, pour ça je n’dis pas. Dire que s’il fallait perdre cent francs pour l’amour du bon Dieu, pour ça je n’dis pas. Mais j’l’aime bien, pour sûr, j’l’aime bien tout de même.

Le prêtre, grave, prononça :

— Il faut l’aimer plus que tout.

Et Sabot, plein de bonne volonté, déclara :

— J’frai mon possible, m’sieu le curé.

L’abbé Maritime reprit :

Dieu en vain ne jureras
Ni autre chose pareillement.

— Avez-vous quelquefois prononcé quelque juron ?

— Non. Oh ! ça non ! — Je ne jure jamais, jamais. Quéquefois, dans un moment de colère, je dis bien sacré nom de Dieu ! Pour ça, je ne jure point.