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paresse, la prodigalité, l’avarice, l’égoïsme, la cupidité, l’ambition.

Prenons pour exemple la paresse.

C’est un penchant assez naturel, et il ne manque pas d’hommes qui font écho aux Italiens quand ils célèbrent le dolce far niente, et à Rousseau quand il dit : Je suis paresseux avec délices. Il n’est donc pas douteux que la paresse ne procure quelque satisfaction, sans quoi il n’y aurait pas de paresseux au monde.

Cependant, il sort de ce penchant une foule de maux, à ce point que la Sagesse des nations a pu signaler l’Oisiveté comme la mère de tous les vices.

Les maux surpassent infiniment les biens ; et il faut que la loi de la Responsabilité naturelle ait agi, en cette matière, avec quelque efficacité, soit comme enseignement, soit comme aiguillon, puisqu’en fait le monde est arrivé par le travail au point de civilisation où nous le voyons de nos jours.

Maintenant, soit comme enseignement, soit comme aiguillon, qu’ajouterait à la sanction providentielle une sanction légale ? — Supposons une loi qui punisse les paresseux. Quel est au juste le degré d’activité dont cette loi accroîtrait l’activité nationale ?

Si l’on pouvait le savoir, on aurait la mesure exacte du bienfait de la loi. J’avoue que je ne puis me faire aucune idée de cette partie du problème. Mais il faut se demander à quel prix ce bienfait serait acheté ; et, pour peu qu’on y réfléchisse, on sera disposé à croire que les inconvénients certains de la répression légale surpasseraient de beaucoup ses avantages problématiques.

En premier lieu, il y a en France trente-six millions de citoyens. Il faudrait exercer sur tous une surveillance rigoureuse ; les suivre aux champs, à l’atelier, au sein du foyer domestique. Je laisse à penser le nombre de fonctionnaires, le surcroît d’impôts, etc.