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Ce que je viens de dire des biens est vrai aussi des maux. Rien ne s’arrête sur le producteur, ni avantages, ni inconvénients. Les uns comme les autres tendent à se répartir sur la société tout entière.

Nous venons de voir avec quelle avidité le producteur recherche ce qui peut faciliter son œuvre, et nous nous sommes assurés qu’en très-peu de temps le profit lui en échappe. Il semble qu’il ne soit entre les mains d’une intelligence supérieure que l’aveugle et docile instrument du progrès général.

C’est avec la même ardeur qu’il évite tout ce qui entrave son action, et cela est heureux pour l’humanité, car c’est à elle, à la longue, que nuisent ces obstacles. Par exemple, supposons qu’on frappe A, le producteur d’un livre, d’une forte taxe. Il faudra qu’il l’ajoute au prix de ses livres. Elle entrera, comme partie constitutive, dans leur valeur, ce qui veut dire que B, C, D, E, devront donner plus de travail pour acheter une satisfaction égale. La compensation sera pour eux dans l’emploi que le gouvernement fera de la taxe. S’il en fait un bon usage, ils pourront ne pas perdre, ils pourront même gagner à l’arrangement. S’il s’en sert pour les opprimer, ce sera deux vexations multipliées l’une par l’autre. Mais A, quant à lui, s’est débarrassé de la taxe, encore qu’il en fasse l’avance.

Ce n’est pas à dire que le producteur ne souffre souvent beaucoup des obstacles quels qu’ils soient, et entre autres des taxes. Il en souffre quelquefois jusqu’à en mourir, et c’est justement pour cela qu’elles tendent à se déplacer et à retomber en définitive sur la masse.

Ainsi, en France, on a soumis le vin à une foule d’impôts et d’entraves. Ensuite on a inventé pour lui un régime qui l’empêche de se vendre au dehors.

Voici par quels ricochets le mal tend à passer du producteur au consommateur. Immédiatement après que l’impôt