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VI

RICHESSE


Ainsi, en tout ce qui est propre à satisfaire nos besoins et nos désirs, il y a à considérer, à distinguer deux choses, ce qu’a fait la nature et ce que fait l’homme, — ce qui est gratuit et ce qui est onéreux, — le don de Dieu et le service humain, — l’utilité et la valeur. Dans le même objet, l’une peut être immense et l’autre imperceptible. Celle-là restant invariable, celle-ci peut diminuer indéfiniment et diminue en effet, chaque fois qu’un procédé ingénieux nous fait obtenir un résultat identique avec un moindre effort.

On peut pressentir ici une des plus grandes difficultés, une des plus abondantes sources de malentendus, de controverses et d’erreurs placées à l’entrée même de la science.

Qu’est-ce que la richesse ?

Sommes-nous riches en proportion des utilités dont nous pouvons disposer, c’est-à-dire des besoins et des désirs que nous pouvons satisfaire ? « Un homme est pauvre ou riche, dit A. Smith, selon le plus ou moins de choses utiles dont il peut se procurer la jouissance. »

Sommes-nous riches en proportion des valeurs que nous possédons, c’est-à-dire des services que nous pouvons commander ? « La richesse, dit J. B. Say, est en proportion de la valeur. Elle est grande, si la somme de valeur dont elle se