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et le mal qu’a le misanthrope, tout misanthrope qu’il est, à le convaincre de sa folie.


Alceste. On s’expose à jouer un mauvais personnage.
Oronte. Est-ce que vous voulez me déclarer par là
Que j’ai tort de vouloir…
Alceste.
Je ne dis pas cela.
Mais…
Oronte. Est-ce que j’écris mal ?
Alceste.
Je ne dis pas cela.
Mais enfin…
Oronte. Mais ne puis-je savoir ce que dans mon sonnet ?…
Alceste. Franchement, il est bon à mettre au cabinet.


Franchement, bon public, on te vole. C’est cru, mais c’est clair.

Les mots vol, voler, voleur, paraîtront de mauvais goût à beaucoup de gens. Je leur demanderai comme Harpagon à Élise : Est-ce le mot ou la chose qui vous fait peur ?

« Quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas, est coupable de vol. » (C. pén. art. 379.)

Voler : Prendre furtivement ou par force. (Dictionnaire de l’Académie.)

Voleur : Celui qui exige plus qu’il ne lui est dû. (Id.)

Or, le monopoleur qui, de par une loi de sa façon, m’oblige à lui payer 20 fr. ce que je puis avoir ailleurs pour 15, ne me soustrait-il pas frauduleusement 5 fr. qui m’appartiennent ?

Ne prend-il pas furtivement ou par force ?

N’exige-t-il pas plus qu’il ne lui est dû ?

Il soustrait, il prend, il exige, dira-t-on ; mais non point furtivement ou par force ; ce qui caractériserait le vol.

Lorsque nos bulletins de contributions se trouvent chargés des 5 fr. pour la prime, que soustrait, prend ou exige le monopoleur, quoi de plus furtif, puisque si peu d’entre nous