Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 3.djvu/148

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autres pays ne diffèrent pas de celui-ci ; et si nous allions réclamer d’eux des réductions de droits, ils ont aussi des Knatchbull et des Buckingham engagés dans des priviléges manufacturiers, et on les verrait accourir à leur poste pour y défendre vigoureusement leurs monopoles. Ailleurs, comme ici, ce n’est que la force de l’opinion qui affranchira le commerce. (Écoutez ! écoutez !) Je vous conseille de ne pas vous laisser prendre à ce vieux conte de réciprocité ; de ne point vous laisser détourner de votre but par ces histoires d’ambassadeur allant de nation en nation pour négocier des traités de commerce et des réductions réciproques de tarifs. Le peuple de ce pays ne doit compter que sur ses propres efforts pour forcer l’aristocratie à lâcher prise. (Acclamations.) — La question maintenant est de savoir sous quelle forme nous nous adresserons à la législature. Demanderons-nous aux landlords l’abrogation des lois restrictives comme un acte de charité et de condescendance ? solliciterons-nous à titre de faveur, ou exigerons-nous comme un droit la libre et entière disposition des fruits de notre travail, soit que nous les devions à nos bras ou à notre intelligence ? (Bravos prolongés.) On a dit, je le sais, que le joug de l’oppression avait pesé si longtemps sur la classe moyenne, qu’elle avait perdu jusqu’au courage de protester, et que son cœur et son esprit avaient été domptés par la servilité. Je ne le crois pas. (Applaudissements.) Je ne puis pas croire que les classes moyennes et laborieuses, du moment qu’elles ont la pleine connaissance des maux que leur infligent les nombreuses restrictions imposées à leur industrie par la législature, reculent devant une démonstration chaleureuse et unanime (bruyantes acclamations), pour demander d’être placées, avec les classes les plus favorisées, sur le pied d’une parfaite égalité. — Les propriétaires terriens me demanderont si, lorsque je réclame l’abolition de leurs monopoles, je suis autorisé par les manufacturiers à abandonner toutes les protections dont ils jouissent. Je réponds qu’ils sont prêts à faire cet abandon (applaudissements), et je rougirais de paraître devant cette assemblée pour y plaider la cause de l’abrogation des lois-céréales, si je ne réclamais en même temps l’abolition radicale de tous les droits protecteurs, en quoi qu’ils puissent