Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 2.djvu/51

Cette page a été validée par deux contributeurs.

lui voyons aujourd’hui ; à peu près comme Orléans a probablement plus d’industrie, malgré tout ce qui lui arrive de Paris, que si Paris n’existait pas.

Mais ces manufactures, nées à l’air de la liberté, auraient le pied sur un terrain solide, inébranlable, et elles ne seraient pas à la merci d’un article d’un des cent tarifs de l’Europe.


8. — INANITÉ DE LA PROTECTION DE L’AGRICULTURE.


31 Janvier 1847.


Si les agriculteurs, que le passé a si peu instruits, ne commencent pas à ouvrir les yeux sur l’avenir, il faut qu’ils soient étrangement séduits par ce que semble renfermer de promesses ce mot même, protection. — Être protégé ! — Et pourquoi pas, quand on le peut ? Pourquoi refuserions-nous des faveurs, des mesures qui améliorent nos prix de vente, écartent des rivaux redoutables, et, si elles ne nous enrichissent guère, retardent au moins notre ruine ? — Voilà ce qu’ils disent ; mais ne nous laissons pas tromper par un mot, et allons au fond des choses.

La protection est une mesure par laquelle on interdit au producteur national les marchés étrangers, au moins dans une certaine mesure, lui réservant en compensation le marché national.

Qu’on lui ferme, dans une certaine mesure, les marchés extérieurs, cela est évident de soi. Pour s’en convaincre, il suffit de se demander ce qui arriverait si la protection était poussée jusqu’à sa dernière limite. Supposons que tous les produits étrangers fussent prohibés. En ce cas, nous n’aurions aucun payement à exécuter au dehors, et, par conséquent, nous n’exporterions rien. Sans doute, l’étranger pourrait encore, pendant quelque temps, venir nous acheter