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matière aussi grave et encore si controversée. Nous nous bornerons à soumettre à nos lecteurs quelques réflexions.

Voici ce que disent les partisans de la taxe unique :

De quelque manière qu’on s’y prenne, l’impôt retombe toujours à la longue sur le consommateur. Il est donc indifférent pour lui, quant à la quotité, que la taxe soit saisie par le fisc au moment de la production ou au moment de la consommation. Mais le premier système a l’avantage d’exiger moins de frais de perception, et de débarrasser le contribuable d’une foule de vexations qui gênent les mouvements du travail, la circulation des produits et l’activité des transactions. Il faudrait donc faire le recensement de tous les capitaux, terres, usines, chemins de fer, fonds publics, navires, maisons, machines, etc., etc., et prélever une taxe proportionnelle. Comme rien ne peut se faire sans l’intervention du capital, et que le capitaliste fera entrer la taxe dans son prix de revient, il se trouverait en définitive que l’impôt serait disséminé dans la masse ; et toutes les transactions subséquentes, intérieures ou extérieures, à la seule condition d’être honnêtes, jouiraient de la plus entière liberté.

Les défenseurs des taxes indirectes ne manquent pas non plus de bonnes raisons. La principale est que la taxe, dans ce système, se confond tellement avec le prix vénal de l’objet, que le contribuable ne les distingue plus, et qu’on paye l’impôt sans le savoir ; ce qui ne laisse pas que d’être commode, surtout pour le fisc, qui parvient ainsi progressivement à tirer quelque cinq et six francs d’un objet qui ne vaut pas vingt sous[1].

Après tout, si jamais l’impôt unique se réalise, ce ne sera qu’à la suite d’une discussion prolongée ou d’une grande diffusion des connaissances économiques ; car il est

  1. V. au tome V, le discours sur l’impôt des boissons, p. 468 à 493. (Note de l’éditeur.)