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Il y a dix-huit siècles, une parole retentit dans le monde : Aimez-vous les uns les autres. Rien de plus clair, de plus simple, de plus intelligible. En outre, cette parole fut reçue non comme un conseil humain, mais comme une prescription divine. — Et pourtant, c’est au nom de ce précepte que les hommes se sont longtemps entre-égorgés en toute tranquillité de conscience.

Il n’y a donc pas un moment où l’humanité puisse subir une brusque métamorphose, se dépouiller de son passé, de son ignorance, de ses préjugés, pour commencer une existence nouvelle sur un plan arrêté d’avance. Les progrès naissent les uns des autres, à mesure que s’accroît le trésor des connaissances acquises. Chaque siècle ajoute quelque chose à l’imposant édifice, et nous croyons, nous, que l’œuvre spéciale de celui où nous vivons est d’affranchir les relations internationales, de mettre les hommes en contact, les produits en communauté et les idées en harmonie, par la rapidité et la liberté des communications.

Cette œuvre ne vous paraît-elle pas assez grande ? — Vous nous dites : « Commencez par demander l’abolition préalable de la guerre. » Et c’est ce que nous demandons, car certainement l’abolition de la guerre est impliquée dans la liberté du commerce. La liberté assure la paix de deux manières : dans le sens négatif, en extirpant l’esprit de domination et de conquête, et dans le sens positif, en resserrant le lien de solidarité qui unit les hommes. — Vous nous dites : « Provoquez la constitution du congrès de la paix. » Et c’est ce que nous faisons ; nous provoquons un congrès, non d’hommes d’État et de diplomates, car de ces congrès il ne sort bien souvent que des arrangements artificiels, des équilibres factices, des forces nullement combinées et toujours hostiles ; mais le grand congrès des classes laborieuses de tous les pays, le congrès où, sans mémorandum, ultima-