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« Les matières premières sont vierges de travail humain ; en principe on ne devrait pas les imposer. Les objets fabriqués ne peuvent plus servir au travail national, nous les considérons comme les plus imposables.

Il se présente donc ici trois questions à examiner : 1o Les matières premières sont-elles le produit du travail ? 2o Si elles ne sont pas autre chose, ce travail est-il si différent du travail des fabriques qu’il soit raisonnable de les soumettre à des régimes opposés ? 3o Si le même régime convient à tous les travaux, est-ce celui de la liberté ou celui de la protection ?

1o Les matières premières sont-elles le produit du travail ?

Et que sont donc, je le demande, tous les articles que les pétitionnaires comprennent dans les deux premières classes de leur projet ? Qu’est-ce que les blés de toutes sortes, la farine, les bestiaux, les viandes sèches et salées, le porc, le lard, le sel, le fer, le cuivre, le plomb, la houille, la laine, les peaux, les semences, si ce n’est le produit du travail ?

Quoi ! dira-t-on, un lingot de fer, une balle de laine, un boisseau de blé sont des produits du travail ? N’est-ce point la nature qui les crée ?

Sans doute la nature crée les éléments de toutes ces choses, mais c’est le travail humain qui en produit la valeur. Il n’appartient pas à l’homme de créer, de faire quelque chose de rien, pas plus au manufacturier qu’au cultivateur ; et si par production on entendait création, tous nos travaux seraient improductifs, et ceux des négociants plus que tous autres.

L’agriculteur n’a donc pas la prétention d’avoir créé la laine, mais il a celle d’en avoir produit la valeur, je veux dire, d’avoir, par son travail et ses avances, transformé en laine des substances qui n’y ressemblaient nullement. Que fait de plus le manufacturier qui la convertit en drap ?

Pour que l’homme puisse se vêtir de drap, une foule