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Il prouvoit en trois points que la simplicité,
Les bonnes mœurs, la probité,
Donnent à peu de frais cette félicité
Qu’un monde imposteur nous présente
Et nous fait payer cher sans la donner jamais.
Notre prédicateur n’avoit aucun succès ;
Personne ne venoit, hors cinq ou six marmottes,
Ou bien quelques biches dévotes
Qui vivoient loin du bruit, sans entour, sans faveur,
Et ne pouvoient pas mettre en crédit l’orateur.
Il prit le bon parti de changer de matière,
Prêcha contre les ours, les tigres, les lions,
Contre leurs appétits gloutons,
Leur soif, leur rage sanguinaire.
Tout le monde accourut alors à ses sermons :
Cerfs, gazelles, chevreuils, y trouvoient mille charmes ;
L’auditoire sortoit toujours baigné de larmes ;
Et le nom du renard devint bientôt fameux.
Un lion, roi de la contrée,
Bon homme au demeurant, & vieillard fort pieux,
De l’entendre fut curieux.
Le renard fut charmé de faire son entrée
A la cour : il arrive, il prêche, &, cette fois,
Se surpassant lui-même, il tonne, il épouvante
Les féroces tyrans des bois,
Peint la foible innocence à leur aspect tremblante,