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ZOÉ, OU LA MÉTAMORPHOSE.

Enfin, Églantine, devenant plus pressante, s’approcha de la table : — Viens donc ! dit-elle d’une voix caressante, ne crains pas d’être grondée ; je ne t’en veux plus… Zoé, je te pardonne !…

À peine eut-elle prononcé ces mots, que la prédiction du sorcier s’accomplit : Zoé reprit sa première forme, ce qui la gêna un peu pour sortir de dessous la table ; qu’aurait-ce donc été si elle eût cessé d’être chatte pendant qu’elle était encore sur les toits ? Ce bonheur l’aurait jetée dans un bien autre embarras, vraiment !


CHAPITRE DIXIÈME.

IL Y A PARFOIS DE BONS MENSONGES.


On devine quelle fut la surprise d’Églantine en voyant sortir de dessous la table une ravissante petite fille, jolie comme un ange, au lieu de la grosse vilaine chatte qu’elle s’attendait à voir paraître.

Zoé, transportée de joie, se jeta aussitôt dans ses bras, lui raconta en peu de mots l’histoire de sa métamorphose, puis elle s’écria, les yeux remplis de larmes : — Ramenez-moi vite à ma mère ! oh ! comme elle va être heureuse de me revoir !

Églantine, qui était très-sensible, comprit à merveille cet empressement de Zoé ; mais elle pensa qu’il serait prudent de prévenir madame Épernay, craignant qu’après avoir été malade de chagrin, elle ne mourût de joie !

Madame Épernay était justement de retour à Paris.

Cette bonne mère était encore très-souffrante ; depuis six mois qu’elle avait perdu sa fille, elle n’avait cessé de pleurer. Zoé était impatiente de la revoir, et l’on avait toutes les peines du monde à l’empêcher de courir l’embrasser : elle ne pouvait croire que le plaisir de retrouver son enfant pût être dangereux pour une mère. Les enfants n’imaginent pas qu’il y ait du danger dans le bonheur.

Églantine, ayant pitié de son impatience, se rendit elle-