Page:Œuvres complètes d’Apulée (éd. Garnier), tome 2, 1883.djvu/34

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que vous avez de mon talent ne permettent pas de hasarder une expression négligée ou peu sentie ! Qui de vous en effet me pardonnerait un solécisme ? qui me passerait une seule syllabe prononcée à l'étrangère ? qui me permettrait de débiter au hasard des mots sans suite, sans correction, comme celles des malades en délire ? C'est pourtant ce que vous pardonnez facilement à d'autres, et avec grande raison sans doute. Mais quant à moi, chacune de mes paroles est par vous scrupuleusement examinée, soigneusement pesée. Je vous vois, la lime et le cordeau à la main, la juger d'après les règles de l'harmonie et du sublime. Autant la médiocrité trouve d'indulgence, autant il est difficile de se maintenir à un rang supérieur. Je reconnais donc combien ma situation est embarrassante, et je ne viens pas vous demander d'autres dispositions à mon égard. Mais du moins, qu'une imparfaite et fausse ressemblance ne contribue pas à vous abuser, attendu, comme je l'ai dit plusieurs fois, qu'on voit rôder bien des mendiants avec le manteau de philosophes. Le crieur public se place lui-même sur le tribunal aussi bien que le proconsul, et là tout le monde le voit avec la toge ; il y reste longtemps soit immobile, soit marchant, ou d'ordinaire criant à tue-tête ; le proconsul, au contraire, parle à voix basse, en faisant des pauses,