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c'est de n'avoir pas de secours dans les maladies les plus dangereuses, de voir son état échapper à la médecine, de ne pas être débarrassé par le fer ou par le feu de parties dont la douloureuse amputation garantirait le salut de toutes les autres.

Chapitre 18

Mais de même que les meilleurs médecins, quand ils ont affaire à des malades complètement désespérés, n'emploient point auprès d'eux les ressources de leur art, de peur qu'un traitement qui serait inutile ne contribue à prolonger le temps des souffrances ; de même, lorsque des hommes sont gangrenés de vices à tel point qu'ils ne puissent trouver de guérison dans les remèdes de la sagesse, il vaut mieux qu'ils meurent. Un mortel que ni sa nature ni son amour-propre ne peuvent déterminer à suivre avec ardeur le chemin de la vertu, mérite, selon Platon, d'être rayé du nombre des vivants ; ou, s'il tient à la vie, il faut qu'il soit livré aux sages, dont la morale pourra le familiariser avec les inclinations vertueuses : et bien certainement il est de beaucoup meilleur qu'un tel individu soit gouverné, et qu'il n'ait pas le pouvoir de gouverner les autres. Loin d'être le maître, il faut qu'il soit l'esclave ; et du moment qu'il est dans l'incapacité d'être préposé comme chef à des subordonnés, son rôle est d'obéir bien plutôt que de commander. Quand un homme est dépravé, disait Platon, non seulement il est moralement inférieur aux autres, parce que le désordre de ses vices le bouleverse en tous sens, et qu'il est livré aux orages de ses désirs ; mais encore la multiplicité de ces mêmes désirs augmente