Ornithologie du Canada, 1ère partie/Le grand Héron bleu


Atelier typographique de J. T. Brousseau (p. 330-331).

LE GRAND HÉRON BLEU.[1]
(Great Heron.)


Autre espèce calomniée sans raison, par Buffon dans ses éloquents paradoxes, mais maintenant rétablie par Wilson, Audubon et autres dans toutes les hautes prérogatives que sa naissance lui assure.

Le Grand Héron bleu se rencontre en cette Province de temps à autre ; il habite constamment les rives de l’Atlantique depuis New-York à la Floride, et dans les Carolines, où il fait son nid, dans des solitudes impénétrables, couvertes d’eau croupissante et malsaine, de rivières ombragées de grands cèdres dont les troncs dénudés de branches et le sommet couverts d’une luxuriante verdure, présentent le spectacle le plus singulier que l’on puisse imaginer : une verdure composée de mousse et de plantes aquatiques recouvrant le marais où le silence de la mort règne, la plus grande partie de l’année. Au haut de ces cèdres, dix à douze couples s’établiront ensemble ; le sommet de chaque arbre porte un nid. Les œufs sont généralement au nombre de quatre, d’une forme oblongue pointue, plus gros que des œufs de poule et d’un bleu-vert clair sans aucune tache. Quand on moleste les Hérons, ils quittent le nid et font entendre leurs accents discordants et semblables au cri de l’Outarde. Ils se nourrissent de poissons qu’ils attrapent avec une rare dextérité ; les mulots, les sauterelles et divers insectes ailés qui fréquentent les bords des ruisseaux, tels sont leurs mets de prédilection.

Le grand Héron bleu a un vol puissant ; il double son cou en deux en volant, étend ses longues pattes, comme une queue et en guise de gouvernail. Ce Héron a quatre pieds de haut[2] ; il a le bec pointu, jaune ; l’espace autour de l’œil, depuis la narine, d’un bleu pourpre clair ; l’iris, orangé ; une calotte blanche, sur sa tête ; les côtés de la tête et l’occiput, couleur d’ardoise foncé ou bleu-blanc, avec une jolie aigrette ; les deux plumes noires, qui partent du derrière de la tête, longues au moins de huit pouces ; le menton, les joues et les côtés de la tête, blancs dans une étendue de plusieurs pouces ; la gorge, blanche, abondamment barrée de noir ; le reste du cou, d’un brun cendré ; du bas du cou, part un grand nombre de plumes blanches pointues et étroites qui lui couvrent la poitrine et lui descendent presque sur les cuisses ; sous ces longues plumes, la poitrine et le milieu du ventre sont de couleur d’ardoise foncé strié de blanc ; les côtés, bleu cendré ; les cuisses et les couvertures des ailes, couleur de rouille foncé nuancé de pourpre ; le dessus des ailes, la queue et le corps, un beau cendré ; il y a aussi de ces longues plumes blanches qui naissent sur les épaules et recouvrent les ailes avec grâce ; les pieds, brun-noir avec des coutures jaunes ou blanches.

Longueur totale, 48 ; envergure, 72.

La femelle est très ressemblante au mâle.


  1. No. 487. — Ardea Herodias. — Baird.
    Ardea Herodias.Audubon.
  2. Ce Héron, d’après Wilson, mesure quatre pieds quatre pouces du bout du bec à l’extrémité de la queue, et au bout des pattes cinq pieds quatre pouces. — Envergure, 72 pouces.