Notice historique sur L’Abord-à-Plouffe/Quelques noms

Typographie L’Action populaire (p. 46-58).

CHAPITRE VII



QUELQUES NOMS


M. Hugh Paton. — E. H. Lemay. — W. Lorrain. — Jeanne D’Arc. — Les belles demeures. — Les écoles. —


Des vivants il ne faut rien ou peu dire. Tous d’ailleurs mériteraient d’être nommées. Cette monographie pourtant serait incomplète si nous ne mentionnions certains personnages… Et d’abord Monsieur Hugh Paton. Monsieur Hugh Paton est un homme de marque. Écossais de naissance, étant né en 1852 dans cette partie de l’Empire Britannique, il vint au pays canadien en 1871, avec le désir de s’y faire un séjour digne de lui. En 1884, il épousa Mlle Isabella Roberton, fille de feu Monsieur Andrew Roberton, marchand de Montréal. À cette occasion, les habitants de l’Abord-à-Plouffe lui présentèrent un témoignage, non équivoque de leurs sentiments respectueux. C’est en 1871 que M. Paton acheta de Olivier Lamer l’île qu’il occupe aujourd’hui. Les années suivantes il acquit de nouvelles terres et il possède actuellement 300 arpents sur le territoire de « Bord-à-Plouffe » comme il appelle l’endroit.

Cette île appartenait aux Bourdeau depuis de nombreuses générations. Depuis son arrivée dans nos parages et toujours, Monsieur Paton s’est montré l’ami et le protecteur des Canadiens-Français. Monsieur Paton est d’une charité proverbiale, et sa digne épouse seconde, de tout son pouvoir, son philanthropique époux. — Petit, trapu, avec figure souriante et enrichie d’une belle barbe, vêtu d’habits modestes, qui n’a vu passer Monsieur Paton dans son joli carrosse ou sa magnifique limousine ? Qui ne l’a vu saluant le pauvre comme le riche ? Et pourtant M. Paton n’est pas des nôtres par la langue et la religion. De plus il est un des plus forts financiers du pays. N’est-il pas propriétaire d’immenses terrains à Cartiervile, à St-Laurent et à Dorval ? N’est-il pas le Président de la Sheddren Forwarding Company, membre du Canadian Cartage and Storage, directeur ou actionnaire du C. P. R., de la Montréal Tramways, etc ? M. Paton, malgré et avec tous ces titres, reste bon et charitable pour tous. Chaque année il encourage les élèves des écoles en leur distribuant de riches prix. Il soutient de ses deniers tous les malheureux qu’on lui recommande. Il contribue même à la fondation ou à l’entretien d’œuvres religieuses. Son but c’est d’être utile à tout le monde et il y réussit. Y a-t-il dans la région une amélioration qui s’impose, les contribuables vont le voir et reçoivent son appui et son concours pratiques. Monsieur Paton a droit qu’on le nomme : sa modestie en souffrira mais la reconnaissance guide notre plume.

L’île Paton sur laquelle M. et Madame Paton ont fixé leur demeure d’été, mais dans laquelle ils viennent durant toute l’année, est une île superbe. Elle est située à quelques arpents du Pont Lachapelle au beau milieu de la Rivière des Prairies. Tous les terrains du voisinage sont entourés de palissades en pierre ou en cèdre et ornés d’arbres gigantesques qui donnent à tout l’endroit l’aspect d’un Parc magnifique. Le chemin qui conduit le visiteur de la route publique à l’île, est tout macadamisé. M. Paton a relié la terre ferme à l’île par un pont splendide en 1886. Sur l’île il y a un terrain des plus riches et des mieux agencés pour le Golf, une serre admirable où on peut cueillir en toutes saisons les fleurs les plus rares et les légumes les plus recherchés ; des écuries des plus modernes avec des chevaux et des équipages de première valeur : mais surtout une maison vraiment princière qui rappelle les vieux châteaux du moyen-âge. Et combien d’autres choses le visiteur ne contemple-t-il pas quand il a l’avantage d’entrer sur ces riches domaines ?

M. Paton a toujours donné de l’ouvrage à de nombreux employés et les nôtres en ont largement bénéficié. Pendant 20 ans les membres du Hunt Club furent reçus au château avec la plus grande courtoisie. Avec le consentement généreux des habitants on y faisait la chasse au gibier… Après la course dans les bois voisins tous les membres du club se reposaient au manoir. M. Paton est encore relativement jeune : 68 ans. Espérons que la Providence les conservera lui et sa noble compagne longtemps encore pour le bonheur de tous ceux qui ont eu ou qui auront l’avantage de les connaître et de vivre avec eux.


M. WILFRID LORRAIN, maire de l’Abord-à-Plouffe


M. EUSÈBE LORRAIN, père


Parc Cartierville-Nord, statue Jeanne D’Arc, Bord-à-Plouffe
Parc Cartierville-Nord
statue Jeanne D’Arc
Bord-à-Plouffe

Un autre personnage que je ne veux pas laisser inaperçu et pour cause, c’est M. Eustache Lemay, marchand de bois de Montréal. On peut dire de lui qu’il est un  “self-made man” M. Lemay a commencé au bas de l’échelle. D’une grande activité et d’un esprit ouvert il a su, par son travail et son énergie, se créer une première place dans le monde des affaires et de la finance. Directeur de la Banque d’Hochelaga et de l’hôpital général, membre de plusieurs clubs choisis, actionnaire dans de nombreuses compagnies, ancien commissaire du Port de Montréal, ami intime de Sir Wilfrid Laurier, Sir Rodolphe Lemieux, Sir Pierre Évariste LeBlanc, bienfaiteur insigne de sa paroisse natale et de plusieurs institutions d’éducation ou de charité, V. G. l’Université de Montréal à laquelle il vient de donner $25000.00 M. Lemay se distingue surtout par son amour du pays qui l’a vu naître, et des anciens avec qui il a vécu. Aussi très souvent on le voit, malgré ses 73 ans bien sonnés, (né le 1 janvier 1845) revenir à l’église paroissiale ou apparaître dans le vieux cimetière où dorment ceux qu’il a connus et estimés : en particulier son épouse bien-aimée Mary Gilchen et son enfant.


Si les cadres de ce petit volume me le permettaient je parlerais volontiers très longuement du Docteur F. Xavier Plouffe médecin de Montréal qui aime son « Bord-à-Plouffe » au point d’en avoir fait son principal séjour en y construisant une superbe villa des mieux placées et qui encourage la grande cause de l’instruction en distribuant chaque année de riches et nombreux prix aux élèves des écoles ; de son fils Adrien, médecin comme lui, qui a fait de brillantes études à Paris et dans les divers hôpitaux d’Europe, et qui est devenu spécialiste reconnu dans les maladies des yeux ; de Damase Lagacé, entrepreneur-général qui a confectionné toutes les routes de la paroisse de St-Martin et qui s’intéresse activement au progrès de sa place natale ; de C. Réal Blache, courtier, qui possède d’immenses terrains et qui est de toutes les bonnes causes ; de Cyrille Taillefer, cultivateur, le doyen d’âge des anciens de l’Abord-à-Plouffe ; de Isidore Valiquette qui a construit à lui seul plusieurs maisons dans la municipalité et qui a cinq fils mariés sur le territoire ; de J.-Bte Bourdeau dit Lamer dit Rapidieux qui a le souvenir des choses passées et qui en parle avec tant d’âme et de talent. Mais ce serait abuser vraiment et je passe.


Sur le Parc Cartierville-Nord qui a été fondé en 1912 par le Maire de l’Abord-à-Plouffe et qui était auparavant la propriété de M. Romain Clermont, avez-vous remarqué la belle statue de Jeanne d’Arc, la Sainte que l’église vient de placer sur nos autels ? L’inauguration de ce monument eut lieu le 16 juillet 1916. L’abbé Richard P. S. S. aumônier militaire de retour du front, fit le sermon. Il y avait foule. Des orateurs aimés chantèrent aussi les louanges de la Pucelle d’Orléans. Cette statue est le don de M. Wilfrid Lorrain qui se glorifie d’être un descendant des habitants de la Lorraine, patrie de la Sainte qui sauva la France. Ce fut donc pour honorer ses ancêtres que M. Lorrain fit ériger ce splendide monument. À cette première pensée il ajouta l’idée d’immortaliser dans le marbre la mémoire de nos soldats canadiens tombés sur le champ de bataille.


Jeanne D’Arc est debout et porte le costume militaire. La nuit, cette héroine de la France est visible, car elle tient dans sa main une brillante et vive lumière. Cette lumière est généreusement fournie par la « Montréal Public Service Corporation » à la demande de son donateur.


M. Lorrain est un actif et un débrouillard. Il est de tous les mouvements. Il possède une immense manufacture de tomates où il emploie 35 femmes et 40 hommes et dans laquelle il fabrique chaque année, en moyenne, 13,000 boites représentant 150,000 livres de tomates. Cette manufacture a été fondée en 1891 par son père Monsieur Eusèbe Lorrain. Elle a aujourd’hui 116 pieds de longueur par 50 de largeur avec deux annexes de 112 par 24.


Malgré cette occupation Monsieur Wilfrid Lorrain ne trouve pas moins le temps de faire de l’immeuble, de l’assurance et d’être membre de toutes les sociétés possibles.


Le gouvernement provincial le nomma Juge de Paix en 1917. Directeur des Forestiers, agent de la Nationale, administrateur de la desserte qui lui doit sa naissance, préfet du Comté Laval en 1917 et 1918, membre de plusieurs clubs choisis, organisateur des Maraîchers dont il fut le secrétaire pendant 3 ans, secrétaire de la Commission Scolaire, propriétaire du Parc « Cartierville Nord », protecteur des conscrits avec M. Louis Cléroux Maire de St-Martin, etc, etc, tel nous apparait Monsieur le Maire Lorrain de l’Abord-à-Plouffe…… M. Lorrain est un ancien élève des Collèges de Montréal et de St-Laurent. Quoi que relativement jeune (M. Lorrain est né le 4 novembre 1869), il est arrivé à force d’activité à se créer une solide et enviable position dans le monde. Pour moi qui le connus si bien et qui eus même à combattre pour le bien général certains de ses projets j’ajouterai que M. Lorrain est toujours d’une grande délicatesse et d’une profonde bienveillance. Je laisse à d’autres le soin de critiquer ses ambitions et son administration… ! M. Lorrain a beaucoup de mérites et j’ai le devoir de le dire.


Quelqu’un me demandait : Avez-vous à l’Abord-à-Plouffe de belles résidences ? Je lui répondis : Sans parler des châteaux (car ce sont de véritables palais) de Monsieur Hugh Paton et du Docteur F. X. Plouffe je puis vous apprendre que nous avons en fait de très jolies demeures même chez nos jardiniers. Pour vous en convaincre allez-y voir les habitations propres et splendides de MM. Réal Blache, de Alphonse Taillefer, Damase Lagacé, Aimé et Paul Boudrias, Joseph Plouffe, Paul Lagacé, Arthur Hotte, Napoléon Clermont, William Jolicœur, Alexandre Francœur, Romain Clermont, Wilfrid Lorain, de Mesdames Gédéon Plouffe, et Hildège Lagacé, Messieurs Georges Lorrain, Horace Brouillette, Jérôme Desrochers, Joseph et Maxime Leblanc, Cyrille Taillefer, etc etc…… Et si mon interlocuteur ne m’eut pas arrêté je les aurais toutes nommées….. Elles sont si coquettes et si propres nos maisons de « chez nous » !


Parmi ces maisons il en est deux que je remarque plus que les autres et pour cause. Ce sont les écoles. L’École de la Commission Scolaire est toute de bois, bien convenable et très spacieuse. Elle date de 1866, trois classes et le logement des institutrices la composent. Elle est située sur la grande route, presque vis-à-vis l’église paroissiale, sur la terre de feu Maximin Mercier. 116 enfants des deux sexes, sous la direction de Mesdemoiselles Catherine et Alice Martin, la fréquentent. Il faut dire que l’instruction est en honneur à l’Abord-à-Plouffe. Les parents comprennent l’importance de l’éducation et s’efforcent de la fournir à leurs enfants.


Il y a aussi l’Académie Jeanne D’Arc fondée et dirigée par Mademoiselle Élodie Boucher et dans laquelle 25 élèves reçoivent des cours spéciaux. 18 vont au collège ou au couvent de Cartierville et 5 aux différents collèges classiques des alentours : Ste-Thérèse, St-Laurent, l’Assomption et Montréal. Les examens, que les Messieurs de la cure ou de la Commission Scolaire, font subir aux élèves, en décembre et en juin de chaque année prouvent bien avec quel zèle et quel dévouement on développe chez nous l’intelligence des jeunes. Ceux-ci d’ailleurs répondent bien à l’appel de leurs Maitresses. Les cahiers de rapports sont très élogieux. L’assiduité, l’application, la politesse, l’instruction religieuse sont en honneur. Les écoles de l’Abord-à-Plouffe sont de véritables écoles modèles et font un bien immense à notre population. L’école est une maison de formation intellectuelle et morale. Aussi Messieurs les Commissaires ont toujours eu à cœur d’engager des maîtres ou maîtresses de premier ordre. Citons : MM. Duplessis, Jos Jasmin, aujourd’hui professeur à Montréal, les Delles Taillefer qui entrèrent plus tard chez les Sœurs de Ste-Croix et Madame Veuve Martin, la mère des institutrices actuelles, qui pendant 18 ans se dévoua à la grande cause de l’éducation de nos petits enfants. Madame Martin mourrait l’an dernier à l’Hôtel-Dieu au mois d’avril et fut inhumée dans sa paroisse natale.


Mais (je termine par là,) ce qu’il faut davantage admirer, ce qui saute le plus aux yeux des visiteurs ou des touristes, ce sont les belles fermes de nos cultivateurs. Autrefois, et il n’y a pas très longtemps, les terres qui ont été vendues pour l’immeuble nous font constater le fait, ces fermes n’avaient pas l’apparence d’aujourd’hui. Elles étaient toutes couvertes de cailloux et remplies de roches. Elles avaient un sol plutôt pauvre. Nos gens sont des actifs et des courageux. Ils ont travaillé à l’amélioration de leurs domaines. Ils comprenaient que l’agriculture est la source de la richesse et la plus indépendante de toutes les carrières. De nos jours la culture maraîchère, la plus lucrative et la plus intéressante, est générale.

Si je ne résistais pas à la tentation je citerais plusieurs jardiniers modèles dont l’Abord-à-Plouffe est fière ! Travaillons le sol car il est l’avenir ! tel est le cri de ralliement auquel nos braves citoyens répondent avec empressement et profit.


CURÉS DE ST-MARTIN


  1. M. Louis Payette ( 1774-1782)
  2. M. Antoine Lemaire (1782-1802)
  3. M. Michel Brunette (1802-1835)
  4. M. Romuald Mercier (1835-1839)
  5. M. Arthur Caron (1839-1847)
  6. M. J.-Bte Bourassa (1847-1851)
  7. M. P. C. Dubé (1852-1880)
  8. M. Urgel Archambault (1880-1881)
  9. M. M. LeBlanc (1801- ? )


VICAIRES DE ST-MARTIN


  1. M. J. B. Drolet (1883)
  2. M. J. Leclerc (1833-35)
  3. M. J. Boisvert (1844-45)
  4. M. J. Guinguet (1845-47)
  5. M. J. L. Lionel (1847-48)
  6. M. A. Maréchal[1] (1848-49)
  7. M. P. Guihomert (1849-51)
  8. M. P. C. Dubé[2] (1851-52)
  9. M. P. Malo (1858-59)
  10. M. A. P. Tassé (1860-66)
  11. M. J. A. C. Larose (1866-68)
  12. M. H. Germain (1868-80)
  13. M. E. F. Boudreau (1880-81)
  14. M. C. C. Forest (1881-83)
  15. M. Louis Gravel (1883-84)
  16. M. C. Beaudoin (1884)
  17. M. O. Laferrière (1884-88)
  18. M. O. Forest (1888-1894)
  19. M. G. Melançon (1894-1900)
  20. M. J. Lévesque (1900-01)
  21. M. A. Perreault (1901-02)
  22. M. F. E. L’Heureux (1902)
  23. M. A. Giguère (1903-1904)
  24. M. H. Deslongchamps (1904-09)
  25. M. A. Deschênes (1909-10)
  26. M. H. Leclerc (1910-11)
  27. M. Adalbert Froment (1911- ? )
  28. M. L. Jasmin (1918- ? )
  29. M. J. Mallette (1919- ? )

  1. M. Maréchal devint plus tard Grand-Vicaire de Montréal.
  2. M. Dubé fut curé de St-Martin de 1852 à 1880.