imprimerie de la Vérité (Ip. 46-48).

LE VRAI CLERGÉ ET LE FAUX


31 décembre 1881


L’Électeur a déclaré, l’autre jour, qu’il y a, au Canada, un vrai clergé et un faux clergé. D’après notre confrère, le vrai clergé est celui parmi lequel l’Électeur compte un grand nombre d’amis ; par conséquent le clergé parmi lequel l’Électeur ne compte pas d’amis, est le faux clergé. C’est bien entendu.

Or, tout le monde sait, et l’Électeur l’ignore moins que personne, que le clergé catholique du Canada, pris dans son ensemble, n’a aucune des tendances radicales et catholiques libérales de notre confrère de la rue Saint-Joseph et de son école. Cela est de notoriété publique et n’a pas besoin de preuve. Il peut se faire qu’il y ait quelques prêtres qui partagent les idées malsaines de l’Électeur et des autres catholiques libéraux, tant rouges que bleus, mais s’il y en a — remarquez bien que nous n’affirmons pas qu’il y en ait — ils sont en si petit nombre que l’on ne doit guère en tenir compte.

Nous faisons abstraction complète des partis politiques, car nous sommes bien convaincus qu’il y a du libéralisme et du gallicanisme dans les deux camps, qu’il y a de soi-disant conservateurs, et de haut placés, dont les « principes » sont absolument les mêmes que ceux de l’Électeur. Or, nous le répétons, c’est chose connue et admise que la masse du clergé n’a aucune tendresse pour les hommes imbus de libéralisme catholique et de gallicanisme, quel que soit le nom qu’ils se donnent, quelles que soient les couleurs qu’ils arborent. Encore une fois, l’Électeur est aussi convaincu de cette vérité que nous le sommes nous-mêmes, et lorsqu’il prétend compter un grand nombre d’amis parmi le clergé, il se sert d’une licence qui n’a absolument rien de poétique. Il sait, de plus, que son affirmation ne trompera personne, qu’il ne réussira pas à faire croire au plus naïf de ses lecteurs que les doctrines par lui prônées sont celles d’une partie notable du clergé. Son but, en parlant du vrai et du fauxclergé, est tout autre ; son but est d’attaquer le clergé, comme corps. Il s’est fait, sans doute, ce raisonnement-ci : « En disant que le vrai clergé est celui qui m’est sympathique, personne ne s’imaginera que je compte un grand nombre d’amis parmi le clergé, car c’est notoirement faux ; mais mes lecteurs, ceux qui ne jurent que par moi, en viendront naturellement à la conclusion que le clergé comme corps, qui ne professe pas mes doctrines, est un « faux clergé. »

Voilà le véritable sens et la véritable portée de l’article de l’Électeur sur le vrai et le faux clergé.

Il passe sur notre pays, comme sur tous les pays du monde, un souffle de haine diabolique contre l’Église et ses ministres. Partout on travaille, ici sourdement, là ouvertement, à ruiner l’influence du clergé, à le représenter comme l’ennemi du progrès, à le rendre suspect aux yeux des masses.

Nous voyons dans cette guerre universelle, la main de la Franc-maçonnerie, qu’on a si bien nommée l’église de Satan.

En Europe, les Gambetta, les Paul Bert, les Ferry, les Frère-Orban, les Sagasta se font sciemment les instruments des loges.

Au Canada, ceux qui travaillent à faire passer notre clergé pour un faux clergé, ou ceux qui ne le défendent pas lorsqu’il est attaqué, calomnié et noirci, accomplissent, eux aussi, la besogne des loges. Seulement, on peut encore espérer qu’ils ne savent pas ce qu’ils font.