Lettres à M. et Mme Cheuvreux/Lettre 1

Bruxelles, hôtel de Bellevue, 1849
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À M. ET À MADAME CHEUVREUX (Extrait).


Bruxelles, hôtel de Bellevue, 1849.


… Pour moi, j’en suis réduit à aimer une abstraction, à me passionner pour l’humanité, pour la science. D’autres portent leurs aspirations vers Dieu. Ce n’est pas trop des deux.

C’est ce que je pensais tout à l’heure en sortant d’une salle d’asile dirigée par des religieuses qui se vouent à soigner des enfants malades, idiots, rachitiques, scrofuleux. Quel dévouement ! quelle abnégation ! Et après tout, cette vie de sacrifices ne doit pas être douloureuse, puisqu’elle laisse sur la physionomie de telles empreintes de sérénité. Quelques économistes nient le bien que font ces saintes femmes. Mais ce dont on ne peut douter, c’est la sympathique influence d’un tel spectacle. Il touche, il attendrit, il élève ; on se sent meilleur, on se sent capable d’une lointaine imitation à l’aspect d’une vertu si sublime et si modeste. — Je me disais : Je ne puis me faire moine, mais j’aimerai la science et je ferai passer tout mon cœur dans ma tête

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