Librairie Antisémite (p. 59-68).


IV


L’AFFAIRE ET LES MOYENS


Comment les Juifs ont-ils pu abattre une si formidable besogne en si peu de temps ? Comment ont-ils obtenu en deux ans ce résultat véritablement inouï de détruire momentanément cette puissance militaire si solide encore d’apparence, cette armée pour laquelle la France avait donné 25 milliards, pour laquelle elle n’avait pas hésité à accepter ce service obligatoire qui pesait si lourdement sur tous ? Ils ont eu la force de l’argent. Quand on écrit cela, certains dreyfusards prennent des airs effarouchés d’autres font semblant de hausser les épaules.

Que peuvent espérer les dreyfusards en prenant ces attitudes ?

À quoi riment ces protestations ridicules, que peuvent-elles signifier pour ceux qui connaissent l’histoire et qui ont l’habitude de réfléchir ? Les choses se sont toujours passées de la même façon. Entrez dans un de nos dépôts d’archives, demandez à propos d’un événement historique quelconque un de ces dossiers jaunis où dorment les secrets, les passions, les mystères des générations écoulées.

Dans toutes les négociations internationales, le premier personnage que vous rencontrerez, c’est l’agent qui paye. Les premières pièces sont relatives à des demandes à satisfaire, à des indications sur la façon de faire passer les fonds, ce qui, avec l’organisation un peu rudimentaire des comptabilités d’autrefois, exigeait toujours des formalités compliquées et longues. Quand Louis XIV était le maître de la politique anglaise et de la politique allemande, comme les Anglais et les Allemands sont les maîtres de la politique française, les ministres de Charles II, les plus minuscules dignitaires des plus petites cours de l’Allemagne, recevaient des subsides réguliers de la France.

Cornély, qui est un grand lecteur de livres, belluo librorum, comme on disait autrefois, trouverait de très curieux renseignements là-dessus dans l’Histoire de Philippe II, de Forneron.

M. Forneron, l’historien de Philippe II, a retrouvé à Simancas, un château perdu dans la Vieille Castille, au fond d’un coffre à bois à moitié rongé par les vers, le détail des sommes qu’Henri de Guise touchait de l’Espagne tantôt sous le nom de Mucio, tantôt sous le nom d’Hercule.

Les grands personnages anglais touchaient également. Le comte de Westmoreland, lord Paget, Thomas Throckmorton, Charles Arundel, tout le monde touchait.

Quant au Juif Lopez, qui était le médecin d’Élisabeth d’Angleterre, il touchait naturellement, mais celui-là fut pendu.

Lopez s’était chargé d’empoisonner sa souveraine comme on a empoisonné Félix Faure, comme on a suicidé ou supprimé tous ceux qui pouvaient gêner le Syndicat.

Pour les historiens de l’avenir, la chose ne sera pas discutable, et Cornély lui-même n’expliquerait pas pourquoi on a violé, à propos de Félix Faure, le règlement qui interdit de procéder à l’embaumement avant que quarante-huit heures ne soient écoulées depuis la constatation du décès.

Il ne nous dirait pas davantage comment il se fait que les momies des Aménophis et des Ramsès se soient conservées pendant cinq mille ans, tandis que, quelques heures après l’embaumement, le cadavre du pauvre Félix Faure exhalait une telle odeur de putréfaction que les gardes municipaux, gens peu sensitifs de leur nature, en étaient incommodés et qu’on fut obligé d’abréger la durée de l’exposition publique.

Jamais ni la famille, ni les intimes amis de Félix Faure, avec lesquels j’ai causé, n’ont protesté à propos de ce que nous avions écrit sur sa mort violente, et jamais aucune enquête n’a été faite à ce sujet.


Il en a toujours été ainsi depuis que le monde est monde.

M. de Malastrie a publié les délibérations officielles du Conseil des Dix qui, après une discussion laborieuse, qui prouve combien les magistrats de Venise étaient vigilants sur le bon emploi des deniers de l’État, allouait certaines sommes pour l’empoisonnement de Bajazet, de Charles VIII et autres personnages en vue qui gênaient la Sérénissime République.

L’Antijuif a donné la photographie authentique du cadavre de Reinach faite au moment de l’exhumation de Nivilliers. Le visage de cet homme, qu’on prétend s’être empoisonné lui-même, porte avec la plus irrécusable évidence les traces d’un coup de revolver.

Quant au général Mercier, il s’attend tellement à ce qui le menace qu’il disait encore, il y a quinze jours, à un de nos amis, qu’il prenait les plus rigoureuses précautions pour se défendre contre des tentatives de ce genre.

Cornély, qui a vécu dans les livres, c’est-à-dire dans la vie du passé, serait bien embarrassé de nous dire pourquoi ce qui se pratiquait autrefois ne se pratiquerait plus aujourd’hui.

Un nouveau principe de vertu, un nouvel idéal moral est-il donc entré dans le monde ? Les doctrines matérialistes auraient-elles donc pour conséquence d’élever le niveau des âmes ? Le plus simple raisonnement démontre le contraire.

Les hommes du passé qui n’avaient pas de doute sur l’existence d’une autre vie, qui croyaient à des peines et à des récompenses éternelles, devaient opposer aux tentations une résistance dont sont certainement incapables nos struggle for lifeurs modernes qui croient que l’homme n’est qu’un assemblage de molécules chimiques et qu’il n’existe aucune différence entre l’être humain et le chien que l’on trouve au coin d’une borne le ventre ballonné et les pattes rigides.

Tout ceci est l’évidence même.

Les personnages qui touchaient l’argent de Louis XIV pour trahir l’Angleterre étaient des lords dont le nom est écrit au Livre de la Conquête de Guillaume et qui vivaient encore sur les immenses domaines dont ils étaient possesseurs depuis cette conquête.

Le duc de Guise est une des figures les plus intéressantes de son temps.

Si de tels gens cédaient à la puissance de l’argent, pourquoi voudriez-vous que les présents de l’Allemagne et de la Juiverie trouvent intraitables ces Panamistes, ces Sudistes, ces chéquards, ces non-lieu que l’on découvre dans toutes les turpitudes de ce temps-ci ?


Écrire ceci, ce n’est pas faire œuvre de pamphlétaire, c’est faire de l’histoire sociale, c’est, encore une fois, constater des évidences.

Mirman a raconté à la tribune, en s’appuyant sur des documents absolument officiels, comment Lanessan avait été révoqué, parce qu’un juge d’instruction avait surpris des lettres qui démontraient que le gouverneur de l’Indo-Chine était le complice d’un maître-chanteur dans toutes sortes d’affaires véreuses.

Lanessan, immobile à son banc, n’a même pas eu une parole de protestation.

Pourquoi voudriez-vous qu’un homme qui commettait de telles infamies, alors qu’il avait un traitement de 300.000 francs, qu’il était un véritable vice-roi, ne vende pas la France à l’Angleterre, maintenant qu’il n’a plus qu’un traitement de 60.000 francs ?

Si les misérables qui composent ce ministère n’étaient pas liés par un pacte de trahison, s’ils n’étaient pas là tout exprès pour accomplir une besogne monstrueuse, pourquoi voudriez-vous que Waldeck-Rousseau, qui n’est pas un imbécile, ait été choisir pour associé un homme tellement taré qu’on peut le traiter de crapule en pleine Chambre sans qu’il balbutie même un mot de réponse ?

C’est un raisonnement de simple bon sens, car il y a dans le parti auquel appartient M. de Lanessan des hommes qui sont moins sales que lui, des hommes qui regimberaient si Mirman leur adressait les outrages qu’il a adressés à Lanessan.

L’intérêt apparent de Waldeck eût été de choisir un homme moins perdu de réputation, moins authentiquement noté d’infamie que Lanessan. S’il a choisi Lanessan, c’est pour que Lanessan préparât l’humiliation de la France par l’insolente visite de Guillaume II à l’Iphigénie, pendant que Waldeck et Galliffet déshonoreraient l’armée française en la forçant à recevoir de nouveau comme officier un Juif que tout le monde sait être un traître.

Que voulez-vous que fassent les soldats lorsqu’ils verront Dreyfus ou Picquart porter les ordres de l’État-Major. Ils diront : « Nous sommes trahis ! fichons le camp. »

Quelle confiance pourraient avoir les chefs de nos escadres au moment d’une guerre maritime en sachant que l’homme qui dirige tout a été ignominieusement révoqué par le Delcassé qui est son collègue aujourd’hui, et qu’il a été convaincu d’indignité en plein Parlement sans faire même un geste de dénégation, sans essayer de plaider la moindre circonstance atténuante.

C’est par des manœuvres de ce genre, et vous n’auriez qu’à ouvrir un livre d’histoire pour savoir à quoi vous en tenir, que l’on a préparé l’écrasement de la malheureuse Pologne. Avant de se ruer sur elle, les trois Puissances coalisées ont entrepris dans le pays un travail de démoralisation et de désorganisation identique à celui qui s’accomplit maintenant chez nous.

Avant le partage, Catherine II exerçait en Pologne l’autorité que Guillaume II exerce en France à l’heure actuelle. Elle avait imposé pour roi aux Polonais son ancien amant, Poniatowski, et elle faisait changer les commandants d’armée qui lui déplaisaient ou qui auraient pu gêner les opérations des puissances co-partageantes.

C’est exactement ce que fait Guillaume II en donnant l’ordre de chasser de l’armée le général Négrier, auquel on ne peut même pas reprocher d’avoir joué un rôle quelconque dans l’affaire Dreyfus, puisque les dreyfusards ne l’ont jamais attaqué à ce sujet.

Sans avoir à son actif aucune victoire retentissante, le général Négrier était, dans l’indigence d’hommes actuels, un de ceux sur lesquels on avait le droit de compter, un de ceux dans lesquels le pays espérait ; il était populaire dans l’armée par son courage, son entrain, son amour pour le métier militaire. Relativement jeune pour un général en chef, il était solide, bien portant, énergique. Guillaume s’en est débarrassé, et si vous voulez vous mettre un instant à sa place, vous reconnaîtrez qu’il a bien fait puisqu’il le pouvait.


J’entends d’ici l’objection que me feront peut-être ceux qui lisent sans parti pris ces études qui sont, comme je l’ai dit, écrites à un point de vue exclusivement historique et social, :

« Si l’argent, comme il est facile de le constater, a toujours joué un rôle considérable pour troubler les nations, comment se fait-il que, dans le passé, les nations, et la France surtout, aient pu résister à des moyens semblables à ceux qu’on emploie aujourd’hui ? »

La réponse est toute simple. L’argent a toujours été une force, mais aujourd’hui il est la Force.

Des traditions très lointaines, des croyances, de puissantes organisations de corps constitués ayant un honneur collectif, le sentiment de l’honneur individuel très vivace dans certaines familles, l’attachement profond au sol natal qui faisait du patriotisme, de la défense du territoire, une passion violente et âpre un peu analogue à l’amour de la propriété, la jeunesse d’une race pleine de ressources, de réserves, d’enthousiasmes, de dévouements disponibles, servaient jadis de contrepoids à l’influence de l’argent, neutralisaient ses ravages. Aujourd’hui, l’argent a facilement raison d’une nation atomisée, émiettée, réduite, selon l’expression de Rivarol, à n’être plus que de la charpie.

C’est une question d’âge. Un jeune homme, à la chasse où à la guerre, sera trempé jusqu’aux os pendant trois jours et n’en ressentira aucun mal ; un vieillard restera six mois sur le flanc ou mourra d’une pleurésie, parce qu’il aura reçu une ondée ou qu’il aura été mis dans un courant d’air.

C’est l’état de dissolution où se trouve la société française qui seul a permis aux Juifs de mener à bien l’œuvre abominable à laquelle ils travaillent depuis deux ans et qui leur permettra, si un réveil ne se produit pas, de faire de la France une nouvelle Pologne et de la livrer à l’étranger.