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(p. 166-168).

77. Le vieil Athanase ne veut pas pleurer.

Le vieil Athanase sort de sa cabane en discutant avec Andréas, Phanis et Dimos. Il semble qu’ils ont une conversation sérieuse.

Le vieil Athanase a froncé ses épais sourcils tout blancs. Son regard bleu semble fâché.

— Qu’est-ce que vous dites, mes enfants ? Crie-t-il. C’est quoi, que vous dites ?

— Mais il est fait pour les lettres, Tonton Athanase, laisse-le.

— Qu’il prenne ses affaires, donc, et qu’il parte d’ici ?

— Oui, qu’il fasse toutes les classes.

— Toutes les classes ? Mais quoi ? Que j’en fasse un savant ?


Ils parlaient bien-sûr de Lambros. Les enfants veulent le prendre avec eux à l’école, qu’il y passe plusieurs années et qu’il apprenne bien les lettres. Pourquoi en faire un berger ?

Ils sont venus prier son papy de le laisser. Mais le papy s’est renfrogné. Alors Dimitrakis a ouvert le cahier de Lambros.

— Regarde papy, dit-il, comme il a appris à écrire. Ça ne fait que vingt-cinq jours qu’il a commencé l’alphabet. Et pourtant voilà où il en est !

— Qu’est-ce que c’est ça ? dit le papy, des lettres ?

— Oui, c’est l’écriture de Lambros ; il a écrit tout ça dernièrement, tout seul, de sa main et selon ses pensées.


Le vieil Athanase a levé la tête, arrangé ses sourcils blancs et pris le cahier dans les mains. Il le regardait à l’envers, mais par respect les enfants faisaient mine de ne pas l’avoir remarqué.

Il l’a regardé longtemps. Et au fond de lui-même, il était émerveillé d’avoir un petit-fils qui avait réussi à aligner toutes ces lettres.

— Qu’est-ce qu’il dit ici ? demanda-t-il.

Dimitrakis a pris le cahier et lui a lu les paroles que Lambros avait écrites tout seul avec des lettres grandes comme des haricots.

« Dimanche nous avons marié notre Aphrodo avec des chants et des violons ; et nous l’avons donnée à Yannis de Colombe ; Et elle nous a embrassés et elle est partie. »

Le vieil Athanase ne voulait pas en parler davantage.

— Maintenant vous pouvez y aller les enfants, dit-il, je vais en discuter avec M. Stéphane. Le voilà qui arrive.


Les trois enfants s’en allèrent. M. Stéphane qui arrivait avait lui aussi la même idée.

— Étant donné que ton petit fils apprend les lettres comme ça, dit-il, et qu’il a de l’appétit pour ça, il faut que tu prennes ta décision. En bas, on va tous en prendre soin de Lambros. Envoie-le à l’école, cinq, dix années, pour qu’il apprenne à écrire, à compter, à lire les livres. Qu’est-ce que tu y gagneras avec un berger de plus ?

— Ce qui est juste est juste, dit le vieil Athanase. Ici en haut il va rester Valaque comme nous. C’est bien que ma descendance ait donné aussi un littéraire… Tu trouves ça juste, M. Stéphane, que deux de mes petits-enfants me quittent la même semaine ?

Et son regard bleu sembla se troubler.

Le vieil Athanase a l’habitude de dire qu’un homme doit tenir sa peine comme un cheval furieux : par la bride. Alors là, justement, il a tressailli un peu de peur d’avoir honte de pleurer.