Les Gaietés/La grande Rieuse, ou la Fille inviolable


LA GRANDE RIEUSE,

OU LA FILLE INVIOLABLE.


Air : Je n’irai plus au bois seulette.


J’aime que l’on soit sans souci,
Mais Nicole rit trop aussi.
Au bois je la rencontre un jour
Et lui déclare mon amour.
Payez-moi, dis-je, de retour,
Daignez vous attendrir,
Ou bien je vais mourir.
La voilà qui rit,
Mais elle rit,
Mais elle rit…
Ah ! Nicolle,
Êtes-vous folle ?
La voilà qui rit,
Mais elle rit,
Mais elle rit…
Nicolle, perdez-vous l’esprit ?

Croyant bien qu’elle m’agaçait,
Je mets la main dans son corset.


Je vais plus bas, sans la fâcher,
Et lorsqu’au but je crois toucher,
Sur l’herbe j’ose la coucher.
Nicolle, à ton vainqueur,
Il faut ouvrir ton cœur !
La voilà, etc.

Il faut qu’en ton joli réduit
À l’instant je sois introduit.
Nicolle dit : L’on n’entre pas…
Je lui réponds : Bel embarras !
J’ai la clé de ton cadenas.
À la forme qu’elle a,
Sens comme elle ira là…
La voilà, etc.

Cette clé va la mettre à bout,
Car c’est un vrai passe-partout.
Mais en vain je fais l’homme adroit,
Je trouve, même pour le doigt,
Le trou de la serrure étroit.
Nicolle, il me paraît
Qu’elle ferme à secret.
La voilà, etc.

Riant toujours, Nicolle alors
Me dit : Tu fais de vains efforts ;
Prêtres, docteurs et financiers,
Dragons, hussards et grenadiers

Ont ici flétri leurs lauriers.
Ma porte pour toujours
Est fermé aux amours.
La voilà, etc.

Oui, mon garçon, un dieu jaloux
A fermé ma porte aux verroux ;
Mon seul plaisir est d’attraper
Ceux qui chez moi viennent frapper.
Nicolle alors de s’échapper,
Et lorsque tout troublé,
Je resserre ma clé,
Je l’entends qui rit,
Mais elle rit,
Mais elle rit…
Ah ! Nicolle,
Êtes-vous folle ?
Je l’entends qui rit,
Mais elle rit,
Mais elle rit…
Nicole, perdez-vous l’esprit ?