Texte établi par B. V. (Bagneux de Villeneuve, alias Raoul Vèze), Bibliothèque des Curieux (p. 105-124).
Chapitre VIII

Les Cousines de la colonelle, Bandeau de début de chapitre
Les Cousines de la colonelle, Bandeau de début de chapitre


CHAPITRE VIII


Le temps avait suivi son cours ; pour les uns comme pour les autres, il accomplissait son œuvre fatale.

Aux Charmettes, on subissait son influence. Georges Vaudrez continuait à adorer sa femme, mais ses joues se creusaient horriblement ; ses mains, agitées par un tremblement continuel, dénotaient des symptômes d’affaiblissement nerveux, réclamant des soins.

— Sacrebleu ! lui disait parfois son ami Albert quand il le voyait à Paris, il ne faut pas te servir si souvent de mes gouttes réparatrices. C’était bon le jour des noces ; mais après, dame ! gare les suites !

— Que veux-tu, répondait Georges, ma femme est charmante, puis cette petite eau qui dort en apparence se pâme si gentiment que je ne sais si j’ai l’esprit très prompt, mais, à coup sûr ma chair est faible.

— Très faible même ! je t’assure que si tu ne prends pas six semaines de repos, en allant à des eaux quelconques, tu es un homme à la mer.

Et intérieurement, le pauvre Georges s’avouait combien cette prophétie était pleine de probabilités.

Mais comment se décider à quitter Florentine ? S’il l’emmenait, adieu la cure ; autant valait rester chez soi et ne pas aggraver la situation par les fatigues d’un voyage.

Quant à Florentine, elle ne se trouvait pas à plaindre au point de vue de ses sensations intimes ; et Georges eût parfaitement pu beaucoup moins se fatiguer personnellement.

Sa jeune femme n’appréciait certes point suffisamment ses efforts et préférait infiniment à leur résultat final les caresses préliminaires dont il les accompagnait ; en cela, fidèle observateur du précepte qui dit aux maris, aux amants de ne point oublier que toujours avant de rentrer un homme poli sonne.

Sous la caresse du doigt expert de Georges, elle éprouvait des jouissances ineffables, de beaucoup supérieures à celles que lui procurait l’union avec son conjoint.

Si elle eût osé avouer cela, un grand souci se fût envolé de l’esprit de Georges ; mais elle craignait de le froisser ; puis il y avait un point noir dans le ciel bleu de son existence : depuis six mois elle était mariée et cependant aucun indice ne venait lui donner des espérances de maternité.

C’était là la cause de ses câlineries, même de ses exigences envers Georges.

La tante Briquart souriait, en écoutant les confidences de Florentine.

Cependant le printemps s’écoula, l’été touchait à sa fin ; Florentine subissait les influences de l’épanouissement de la nature et Georges tremblait de plus en plus.

— Mon cher Vaudrez, lui dit un matin son docteur, venu déjeuner aux Charmettes, nous sommes de trop vieux amis pour que je ne vous dise pas la vérité : eh bien ! si vous ne partez pas au plus vite sur les bords de la mer, je ne vous donne pas six mois de santé ; l’impotence frappe à votre porte.

— Docteur, vous riez, et ma femme ?

— Oh ! mon bon ami, votre femme ira où il lui plaira, mais je la considère comme une des premières causes fatales à éliminer.

— Un mois, six semaines loin d’elle ?

— Il n’y a pas à tergiverser, vous m’avez compris ?

— Parfaitement, docteur, c’est bien triste de n’avoir plus vingt ans.

— Je me le répète tous les jours, répondit en riant le docteur.

— Oui, mais Florentine les a, elle ! la laisser seule !…

— Et la tante Briquart, qu’en faites-vous ?

— Au fait, si elle voulait venir passer le temps de mon absence à la campagne. Mais elle prétend que le voisinage du bois lui donne des rhumatismes, que l’air du pays est humide, qu’il y a des moustiques, des crapauds, que sais-je ?

— La colonelle n’a pas les aspirations champêtres ! Eh bien, arrangeons les affaires : envoyez ces dames à Saint-Gildas, en Bretagne. Il y a là une maison de villégiature, établie au bord de l’Océan et tenue par des religieuses, sur l’emplacement même de ce monastère qu’Abeilard, après sa mésaventure, voulut réformer ; entreprise remplie d’écueils, paraît-il, car la supérieure des nonnes de Saint-Gildas ne manque jamais de montrer aux visiteurs la lucarne du réduit intime par où il échappa à la fureur de ses moines, lesquels, lui ayant en vain exprimé les idées qui inspirèrent plus tard au Fabuliste sa fable du Renard auquel on a coupé la queue, tentèrent de se débarrasser du gêneur en l’empoisonnant.

— Et les hommes ne sont pas admis dans cette maison ?

— Non, il n’y a que des familles, les maris même sont renvoyés dans le village. Oh ! vous pourriez être tranquille.

— Je ne suis pas jaloux, mais enfin…

— Enfin… oui, je comprends, allez-y de confiance.

Le soir, le lendemain qui suivirent cette conversation, Georges fit à Florentine et à Mme Briquart un tel éloge de Saint Gildas, qu’elles rêvèrent d’un séjour dans la presqu’île de Ruis, la patrie de Lesage, tellement que, quinze jours plus tard, ces dames débarquaient devant la grande porte massive du couvent, et, l’esprit légèrement interloqué par la simplicité primitive du lieu, elles prenaient possession des monacales chambres retenues pour elles.

La tante surtout faisait légèrement la moue.

Quant à la jeune femme, la nouveauté du genre de vie qu’on mène dans ces parages l’enchantait.

Dès le lendemain matin, elle explora la grève, prenant un plaisir extrême à enfoncer ses pieds dans le sable, à pêcher des crevettes, à détacher des rochers ces coquillages appelés sur les lieux des berniques et qu’on croque tout vivants.

Ce plaisir fut, au bout de quelques jours rendu beaucoup plus vif.

À grand fracas, on avait vu s’installer au couvent la duchesse d’Hérisez et son fils Gaétan, un bel adolescent de dix-huit ans, n’ayant encore au menton qu’un léger duvet et dont le teint rose, blanc, les yeux bleus « n’annonçaient point la virilité », chuchotaient les vieilles religieuses. Un véritable chérubin ayant passé l’âge réglementaire, au-dessous duquel le sexe fort est seulement admis dans la communauté. Mais il est avec le ciel des accommodements : la duchesse, un des piliers protecteurs de la communauté, ayant déclaré que Gaétan venait seulement d’atteindre sa quinzième année, personne ne lui eût osé demander compte des années de nourrice.

Il ne tarda pas à devenir le compagnon de promenade de Florentine. Mme Briquart et la duchesse ayant sympathisé, on laissa errer en paix les enfants, comme on les appelait au couvent.

Naturellement, Chérubin tomba éperdument amoureux de sa compagne et devint, en imagination, le plus grand scélérat des temps passés et modernes.

Mais il était timide et ses désirs ne sortaient pas de sa cervelle, ses yeux seuls en révélaient les transports.

Florentine s’amusait beaucoup de la passion de son juvénile adorateur, et depuis un mois on flirtait à faire envie aux Yankees les mieux réussis, lorsque Mme Briquart, qui s’ennuyait à périr, eut l’idée de s’absenter pendant une huitaine de jours, sous prétexte d’aller consulter son médecin de Paris.

— Je reviendrai encore bien avant que Georges ait fini sa saison ; du reste, je te laisse sous la protection de la duchesse d’Hérisez, que veux-tu de mieux ?

Il n’y avait rien à objecter.

Depuis quatre jours, elle respirait à l’aise dans son logis de la rue d’Assas, quand un matin arriva à Saint-Gildas une dépêche de Georges :

« Veux partir pour Menton y passer l’hiver ; sans perdre une minute, venez me rejoindre. »

— Madame, que faut-il faire ? demanda Florentine, toute effarée, à la duchesse.

— Ma chère enfant, vous êtes trop jeunette pour voyager seule, il vous faut un mentor, je vous offre Gaétan.

— Chérubin ?

— En personne ; il est assez grand pour vous éviter les embarras matériels du voyage et ne l’est pas assez pour vous compromettre ; voulez-vous accepter son bras ?

— Si vous trouvez que c’est convenable, je le veux bien.

— C’est dit, télégraphiez à votre seigneur et maître que vous arrivez. En passant à Paris, vous prendrez votre tante, qui ne sera pas désolée, j’imagine, de ne point revoir la grève de Saint-Gildas, et vous partirez demain.

Le climat de Bretagne a ses charmes, surtout pour les gens qui aiment les ciels gris ; mais il a aussi ses inconvénients, dont le premier est d’avoir une température capricieuse.

Le temps était encore beau quand on reçut la dépêche de Georges. Au moment du départ, le vent faisait rage sur la falaise et les goëlands remplissaient l’air de cris de mauvais augure.

Gaétan avait reçu des leçons minutieusement détaillées de sa mère, sur la façon dont un gentilhomme doit se comporter, lorsqu’une femme lui fait l’honneur d’accepter sa société ; et comme Florentine prenait un plaisir extrême à se faire gâter par lui, le traitant comme un enfant sans conséquence, Chérubin se permettait de nombreuses privautés et l’on ne prenait point garde à la neige, qui s’était mise à tomber avec acharnement.

Jusqu’à Nantes, tout marcha bien ; là, il fallut constater que l’express avançait moins vite qu’un omnibus, ce qui n’émut pas nos deux voyageurs.

Gaétan avait bien enveloppé Florentine ; il s’était blotti près d’elle sous la couverture et le temps froid ne leur semblait pas si pénible à supporter.

Cependant, il y avait de fréquents arrêts.

Le Mans s’annonça dans le lointain, deux heures plus tard qu’on ne l’attendait, et le chef de gare vint déclarer aux voyageurs qu’il craignait beaucoup qu’on ne pût aller plus loin que la Louve, la voie étant encombrée.

La situation se corsait, et Florentine ne riait plus.

Elle trouvait son compagnon moins enfant qu’on ne le supposait ; la perspective de rester en panne la nuit entière ne la séduisait pas : elle avait peur.

Tout à coup le train s’arrêta brusquement devant Bretoncelle.

Une demi-heure se passe, rien ; on ne bouge pas.

— Mon Dieu ! mon petit Gaétan, qu’allons-nous devenir ?

On avait à Saint-Gildas, en plaisantant, pris ces jolies habitudes d’enfance ; Gaétan disait Madame, mais la jeune femme, moins cérémonieuse, disait Gaétan tout court.

Il faisait un froid de loup.

Deux partis restaient à prendre : télégraphier pour rassurer la famille et chercher un gîte.

C’est ce qu’on fit, et en riant, le premier moment de stupeur passé.

Il y avait deux pieds de neige.

Comment faire pour gagner Bretoncelle, ce port de salut, où l’on était menacé de passer trois ou quatre jours et qui, en fait de ressources, est loin de valoir Paris.

— Madame, je vais être votre cheval, dit Gaétan en rougissant très fort.

— Et comment cela ?

— Vous ne pouvez marcher dans cette neige, vous monterez sur mes épaules et je vous porterai.

À son tour Florentine, rougit.

— Bast ! se dit-elle, c’est un gamin !

Et elle grimpa à califourchon sur les épaules de l’adolescent.

On a beau être imberbe, avoir ainsi une jolie femme, dont on est amoureux, sur les épaules, cela émeut. Aussi, lorsqu’on arriva au gîte, Gaétan était fort agité.

Les paysans, flairant une bonne aubaine, s’empressèrent de réchauffer les voyageurs et de les faire souper. Si bien que l’imprévu de la situation, la douce chaleur aidant, ranima la jeune femme et que, joyeux l’un et l’autre, Gaétan et Florentine firent honneur au lard, à la soupe aux choux et au vin blanc qu’on leur servit.

La soirée se passa rapidement, plus même qu’à Saint-Gildas.

Vers neuf heures et demie on se chauffait devant l’âtre, en devisant sur mille choses diffuses, sous le voile desquelles se cachait le petit dieu malin, riant dans ses ailes, et Florentine se disait que si son mari, qui la croyait sous l’égide de la colonelle, la voyait folâtrer ainsi avec Chérubin, il pourrait bien ne pas être satisfait.

— Cependant c’est un moutard, ajoutait-elle, pour apaiser le cri de sa conscience.

Tout à coup, une grosse voix les interrompit :

— Monsieur, Madame, votre chambre est prête, vous pouvez y aller, il y a de bonnes couvertures et un bon lit ; d’ailleurs, deux jeunes gens comme vous, quand ça se touche ça n’a plus froid.

Ces simples paroles médusèrent Florentine et émurent fort Gaétan, qui, ne perdant pas sa présence d’esprit, murmura à l’oreille de sa compagne :

— Ne le détrompez pas et ne craignez rien, je suis un gentilhomme.

Eh bien ! ce ne fut pas la sécurité qu’amenèrent ces paroles dans l’esprit de la jeune femme.

— Moutard ! se dit-elle.

Néanmoins, une secrète émotion l’agitait.

— Si nous le détrompons, continua Gaétan, il nous mettra à la porte et ce ne sera pas drôle.

C’était juste ; Florentine le comprit et le suivit sans protestation, mais arrivés dans la chambre, ils se regardèrent en riant.

— Eh bien ! demanda-t-elle.

— Eh bien, vous allez vous mettre au lit, j’irai passer la nuit dans la cuisine.

— Ah ! non, j’aurais trop peur toute seule ; sortez un moment et revenez.

Gaétan, au bout d’une demi-heure, rentra tout pâle et jeta un regard à la fois hardi et curieux sur le lit ou était couchée Florentine, sa fine tête blonde reposant sur l’oreiller, les draps, les couvertures dessinant son corps charmant.

Gaétan se sentit frissonner ; des idées, des idées que madame sa mère ne lui avait pas inculquées, bouillonnaient dans son esprit.

— Non, se dit-il, non ; elle est sous ma sauvegarde, je ne puis abuser de la situation. Cependant !… cependant !…

Il s’assit sur une chaise, le moins mal possible, avec une attitude de chien fidèle, couché aux pieds de sa maîtresse.

Au bout d’un quart d’heure, ses dents claquaient, il était menacé de passer à l’état de glaçon.

Florentine eut pitié de lui :

— Ma foi ! s’écria-t-elle bravement ; « Honni soit qui mal y pense ! » Mon petit Gaétan, vous allez attraper la mort sur cette chaise, couchez-vous près de moi, tout habillé.

En entendant ces doux accents, Chérubin crut s’évanouir.

— Eh bien ! qu’attendez-vous ? demanda Mme Vaudez.

— Je suis gelé.

— Allez chercher une cruche d’eau chaude et venez vous réchauffer.

Ce ne fut pas long à trouver ; avec de chastes précautions, Gaétan la glissa sous les pieds de la jeune femme, qu’il vit émerger des toiles du lit tout blancs, tout roses ; puis boutonnant son paletot, il se coucha et regarda sa voisine, qui lui rit au nez.

— Hum ! Gaétan, si mon mari nous voyait, qu’est-ce qu’il dirait ?

— Il agirait probablement désagréablement pour nous deux.

— Pourtant ?…

— Oui, oui, murmura Gaétan, qui, malgré la gelée atroce du dehors, trouvait qu’il avait trop chaud.

Personne n’avait envie de dormir et l’on causa, si bien même que le cœur de Gaétan débordant, il osa dire :

. . . . . . . . . . . . .

— Tiens, tiens, voyez-vous cela, monsieur Bébé ! lui répondit Florentine, légèrement railleuse.

— Bébé, soit, mais un bébé qui, en ce cas, voudrait rentrer dans le sein de sa petite mère.

— Eh bien ! eh bien ! et mon mari ?

Ce pauvre Chérubin ! des gouttes de sueur perlaient sur son front, les ailes de ses narines roses comme celles d’une jeune fille tremblotaient étrangement.

Florentine était si jolie ! Gaétan bien novice. La fleur d’oranger, sans être profanée, eût pu le couronner ; mais il est des choses qu’on sait probablement d’instinct, car tout à coup sa voisine s’écria :

— Finissez donc, Gaétan, vous me chatouillez.

Mais Gaétan n’obéissait pas.

— Eh bien ! eh bien ! qu’est-ce que cela veut dire ?

— Cela veut dire « je vous aime ! »

— Ensuite, Bébé, qu’est-ce que cela prouve ?

— Que je voudrais vous devoir ma première sensation amoureuse.

— Ta virginité ! Bébé, tu me l’offres ? ça, c’est gentil, mais là, vrai, jamais tu n’as…? Voyons, raconte-moi tes petites affaires.

— Jamais je n’ai approché une femme comme je vous approche, mon précepteur ou ma mère ne me quittaient pas un instant.

— La drôle de chose ! Seulement, vois-tu, à présent que tu m’as fait ta déclaration, je ne puis te garder ainsi dans mes bras, tu vas geler, mais c’est de ta faute, il fallait être sage ; d’abord c’est très mal ce que vous faites-là, monsieur Chérubin ; une femme mariée, fi donc ! que c’est laid !

— Non ! c’est très joli et je vous adore.

— Petit scélérat, allez-vous-en.

Florentine le repoussa hors du lit, mais il faut croire que le mouvement avait été mal combiné, car le délinquant expulsé de dessus le lit se trouva dedans.

— Ah ! le gredin, mais c’est qu’il est malin comme un singe ; voyons, Gaétan, soyez sage, ou je vous renvoie tout de bon.

L’enfant obéit, mais comme ses pareils, qui ne font jamais moins de bien que lorsqu’on ne les entend pas, il s’occupa à déboutonner son pantalon.

Tout à coup Florentine jeta un petit cri :

— Voyons, voyons, assez, voilà que tes bêtises recommencent ! Bébé, vrai, je me fâche. Ta virginité, vois-tu, c’est amusant cette idée-là, et si je n’étais pas une honnête femme, on verrait ; mais j’aime mon mari. Là… là… le brigand, c’est qu’il ne m’écoute pas. Tu me chatouilles, Gaétan, je le dirai à ta mère.

Mais Gaétan chatouillait toujours et un rire nerveux s’emparait de la jeune femme, qui s’arrêta comme suffoquée.

Chérubin profita de ce moment d’accalmie, et Florentine ne put que protester contre le don de cette fleur d’amour que son compagnon s’obstinait à lui offrir : car il le lui imposait, et, faut-il l’avouer, ses sens à elle se faisaient les complices des entreprises de Chérubin.

Elle constata une différence sensible entre ce qu’elle ressentait et ce qu’elle connaissait ; ma foi, elle cessa de se défendre et l’heureux Bébé fut pardonné.

Une première fois… une seconde… même une troisième ; tout à coup la lumière se fit dans l’entendement de Florentine et elle se dit :

« Je sais maintenant pourquoi je n’aurai probablement pas d’enfants de Georges. Dans ce monde il n’y a que la foi qui sauve, conservons la sienne intacte et rendons-le heureux sans participation. »

Pour faire la joie de ce cher époux, Florentine combla de bonheur Chérubin, qui ne demandait qu’à se montrer prodigue de démonstrations, et la nuit fut bien employée.

En riant, le lendemain, Gaétan et Florentine débarquèrent chez Mme Briquart, qui se confondit en remerciements à l’adresse de Gaétan, un peu confus de les recevoir.

— Ne le flattez pas ainsi, cousine, dit la jeune femme, il ne mérite pas vos louanges exagérées.

— Ah, madame !

— C’est bon, c’est bon, petit masque, je m’entends.

Florentine, accompagnée par sa cousine, rejoignit son époux, et six semaines plus tard le docteur disait à M. Vaudrez, inquiet d’un léger malaise de la jeune femme :

— Ce ne sera pas grave, dans quelques mois la crise finale se produira par la naissance d’un beau bébé.

— Docteur, vous croyez ?

— Je ne crois pas, j’en suis sûr ; vous êtes encore un vert galant, mon cher monsieur, et je vous souhaite un garçon.

Georges, ravi au troisième ciel, serra dans ses bras sa jeune femme, qui rougit très fort, sans doute de bonheur et d’émotion.


Les Cousines de la colonelle, Vignette de fin de chapitre
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