Les Chroniques de Sire Jean Froissart/Livre I, Partie I/Chapitre CCXXII

Livre I. — Partie I. [1345]

CHAPITRE CCXXII.


Comment le comte de Lille départit ses gens et les envoya en garnison par les forteresses de Gascogne.


Cette propre journée que le comte de Lille et les barons et les chevaliers de Gascogne qui avec lui étoient furent venus en la Réole, ils regardèrent et avisèrent l’un par l’autre qu’ils se départiroient et trairoient ès garnisons, et guerroyeroient par forteresses, et mettroient sur les champs quatre ou cinq cents combattans, dont ils feroient frontières ; et en seroit chef et meneur le sénéchal de Toulouse à Montauban, le vicomte de Villemur à Auberoche[1], et messire Bertrand des Prez à Pellagrue[2], messire Philippe de Dyon à Montagrée, le sire de Montbrandon à Maudurant[3], Ernoult de Dyon à Lamougies, Robert de Malemort à Beaumont en Laillois[4], messire Charles de Poitiers à Penne en Agenois, et ainsi les chevaliers de garnison en garnison. Si se départirent tous l’un de l’autre ; et le comte de Lille demeura en la Réole, et fit réparer la ville et la forteresse tellement qu’elle n’avoit garde d’assaut que on y fit, sur un mois ou deux. Or retournerons au comte Derby qui étoit en Bergerac.

  1. Bourg du Périgord, entre Périgueux et Montignac.
  2. Pellegrue, sur la frontière du Bazadois et du bas Périgord.
  3. Madurand, sur la Dordogne, un peu au-dessous de Bergerac.
  4. Vraisemblablement Beaumont de Lomagne, sur la rivière de Gimone. Elle est nommée ici Beaumont en Laillois, parce qu’elle appartenait au comte de Lille en Jourdain, appelé dans tous les imprimés et dans plusieurs manuscrits le comte de Laille.