Au Vatican, par ordre exprès du Saint-Pontife, l’an dernier du regne de la papauté [1797] (p. 35-41).

CONFÉRENCE QUATRIÈME.

Tous les Rois assemblés, le Pape revêtu d’une sougenille ; les Catins des rois ; Louis sans tête, roi de Pique ; une Furie, sa compagne ; les ombres de Baseville et de le Pelletier, Les Furies, les Démons et tout l’Enfer assemblé.
LE DIABLE, assis devant son tabernacle.

Venez, avancez-vous, ô juges des enfers,
Effrayez par ma voix, tous les peuples divers ;
Sur terre il se commet mille meurtres infâmes ;
Cela vient, nous dit-on, par la faute des femmes,
Ces monstres revêtus de moire ou de satin,
Et dont tout l’art consiste à faire une putain,
Ont dans notre manoir apporté tous les crimes ;
Et parmi nos héros, assemblé leurs victimes ;
Il faut mettre ordre à tout, ô juges, prononcez ;
Je fais exécuter tout les arrêts lancés :
Je suis las des forfaits, qui commis sur la terre,
Présentent à nos yeux une éternelle guerre.
D’abord jugez le pape, un prêtre scélérat,
Veut de votre vengeance un formidable éclat.

Ce bougre calotté m’excite à la vengeance,
Et je veux que par lui le suplice commence ;
En effrayant ainsi tous ces peuples divers,
Nous n’aurons plus ici qu’un nombre de pervers.
Je ne veux pas pour lui la simple guillotine,
À des tourmens cruels Lucifer le destine,
Je le donne aux furies, en étant tourmenté,
Le bougre s’en prendra à la divinité.
D’elle par trop long-temps lâche et perfide organe,
Il sut l’interpréter en fripon foutromane.
Qu’il soit pendu sur l’heure, oui sans aucun procès.
Pendre un pape en enfer c’est un jour de succès.
Paris célébrera ce grand jour de victoire,
Aux enfers ce sera le comble de la gloire.

L’OMBRE DE BASEVILLE.

Votre vengeance est juste, ô roi des noirs enfers,
Son trop lâche forfait étonne l’univers,
Mais dans cet instant-ci mon ombre lui pardonne,
Ainsi, quoique votre courroux sollicite et ordonne,
Que l’humiliation soit son seul châtiment.

L’OMBRE DE LE PELLETIER.

Souffrez Satan, souffrez que je pense autrement,
Que ce lâche coquin soit renvoyé sur terre,
Pour y subir enfin les horreurs de la guerre,

Les Français, tous s’empressent pour le bien punir,
Son suplice y est prêt laissez-le lui subir.

SATAN.

D’après tous vos avis, je renvoie cet infâme,
Mais avant de partir, je jure sur mon ame,
De lui faire essuyer certaine correction,
Qui pour un temps sans doute lui donnera raison.
Or, venez-ça furies, armez la discipline,
Et fouettez ce gredin du talon à l’échine,
Mais pour mieux célébrer cet objet important,
Je veux que le caffard soit fessé en chantant,
Lui pendant ce temps-là dira ses patenôtres,
Allons chatouillez-moi le cul de cet apôtre,

Les trois Furies armées de fouet.


ALECTO.

Allons vite la culotte,
Bien baissée jusqu’au jarret,
Et n’es-tu pas toujours prêt
Quand il s’agit d’une motte,
Allons vite la culotte,
Bien baissée jusqu’au jarret.

LE PAPE.

Par pitié mesdames les furies, au nom des clefs du paradis, ménagez mon derrière.

SATAN.

Point de miséricorde.

TISIPHONE, même air.

Monseigneur de la calotte,
Vite dépêchez-vous donc,
Pour ce cul point de pardon,
Allons troussez cette cotte,
Nous allons en cet instant
Faire jaillir votre sang.

Tout le chœur répète le refrain.

MÉGÈRE, même air.

De la main d’une dévote,
Tu ne souffrirois pas tant,
Tu dois bien savoir pourtant
Quelle fesse de bonne sorte,
Mais vive un bras de furie,
Pour faire cette œuvre pie.

Toutes les trois Furies déchargent leurs fouets sur les reins, les fesses et les cuisses de sa sainteté, qui les mains jointes crie grace.

SATAN.

Mais quel objet vient donc frapper ma vue,
J’ai pourtant ce matin fait ici la revue,
Et je vois de mes gens tout le nombre augmenté.
Un sans tête de plus fait ma curiosité ;
Ensuite une Furie formant la quatrième,
Oh oh ! que signifie le nombre plus troisième ?

UNE QUATRIÈME FURIE.

Monarque des enfers, cesse de t’étonner, tu vois en moi le génie familier d’Antoinette, ci-devant reine de France, du corps de Marie-Thérèse, impératrice d’Hongrie, j’ai passé dans le sien ; j’ai présidé à tous ses forfaits ; j’ai été l’ame de ses lubricités, de son libertinage affreux, et cet imbécille qui m’accompagne et qui ressemble à Saint-Denis comme deux gouttes d’eau, à la mitre près, c’est Louis Capet, décédé à la guillotine de France, place de la Révolution.

SATAN.

Scélérat, c’est donc toi, ma foi je t’attendois,
Non pour t’administrer ce que tu prétendois,
Mais pour te corriger de ta folle sottise,
De ta scélératesse, ainsi que ta bêtise,
Tu dois bien maintenant en être convaincu,
Qu’un glaive a fait tomber ta face de cocu.
Je ne me trompe pas, et le bougre est si bête,
Qu’en venant ici bas il oublia sa tête.

LOUIS sans tête, parlant en vampire.

Satan ne parlez pas de cette vile folie,
Je l’ai trop bien expié en y laissant ma vie.
C’étoit-là le seul prix de mes lâches forfaits,
Qu’il n’en soit plus question, j’y renonce à jamais,
Et la Furie présente, image de Toinette,
Rend en ce grand moment mon ame satisfaite.

SATAN.

Allons, allons, eh bien soit, laissons ce grand fracas,
Je veux que dans l’enfer on vive sans tracas.
Je ne puis néanmoins, de ta métamorphose,
Voir le drole d’effet, mais parlons d’autre chose.

Rions, buvons, chantons, faisons tous bien les foux,
Chassons d’ici le Pape, il nous met en courroux.

Les Furies enmènent le pape à grands
coups de fouet.

FIN.