Le premier livre des Sonnets pour Hélène/D’autre torche mon cœur

Sonnets pour Hélène, Texte établi par Roger Sorgéds. Bossard (p. 93).
XXXVIII

D’autre torche mon cœur ne pouvoit s’allumer
Sinon de tes beaux yeux, où l’amour me convie :
J’avois desja passé le meilleur de ma vie,
Tout franc de passion, fuyant le nom d’aimer.

Je soulois maintenant ceste Dame estimer,
Et maintenant ceste autre où me portoit l’envie,
Sans rendre ma franchise à quelqu’une asservie :
Rusé je ne voulois dans les rets m’enfermer.

Maintenant je suis pris, et si je prens à gloire
D’avoir perdu le camp, frustré de la victoire :
Ton œil vaut un combat de dix ans d’Ilion.

Amour comme estant Dieu n’aime pas les superbes :
Sois douce à qui te prie, imitant le Lion.
La foudre abat les monts, non les petites herbes.