La Muse des familles1857-1860 (p. 10-11).

LE DON DES LARMES.

Du Christ une larme bénie
Sur l’homme ingrat tombée un jour
Fut par les anges recueillie
Et portée au divin séjour

De cette perle sans pareille,
Le Seigneur d’un souffle créa
Un séraphin, chaste merveille,
Dont le doux nom fut Eloa

De cet ange né d’une larme,
Ô femmes ! vous êtes les sœurs…
Pour vous douer d’un tendre charme,
Le ciel vous fit le don des pleurs.

Pour rafraîchir le cœur aride
De l’homme ici-bas malheureux
Dieu cacha dans votre œil limpide
Une source aux flots amoureux

Pour laver toutes les blessures
Et guérir toutes les douleurs,
Il transforma vos larmes pures
En dictâmes réparateurs…


Aussi, beaux anges de la terre,
Vos pleurs s’empressent de couler
Partout où s’offre une misère,
Une infortune à consoler.

Comme aux diamants de l’aurore
S’ouvrent les languissantes fleurs,
L’âme qu’un mal secret dévore
S’ouvre aux doux trésors de vos pleurs.

Vos larmes du cœur sont la pluie,
Et l’Espoir, colombe du ciel,
Dans cette onde qui purifie
Ravive ses ailes de miel.

En vous, la pitié, la tendresse
Jamais ne sauraient sommeiller…
Femmes, voilà pourquoi sans cesse
Vos yeux sont prêts à se mouiller.

Ah ! que la joie et ses délires
Vous prêtent d’attraits enchanteurs !
Mais, que plus doux sont vos sourires
Lorsqu’ils sont humides de pleurs !

Gabriel Monavon