Le Poulailler/Chapitre12

Librairie agricole de la Maison rustique (p. 114-122).

CHAPITRE II

Du plumage.


Chez la poule, on peut établir trois catégories de plumes :

1° Les grandes, qui ne se trouvent qu’à l’aile pour le vol, et au croupion pour former la queue ; 2° les moyennes, qui servent de recouvrement aux grandes et se trouvent aussi à l’aile et au croupion ; 3° les petites, qui couvrent le cou, le dos, les flancs, la poitrine, les épaules et une partie des ailes. Toutes sont de dimension et de formes variées, même dans chaque catégorie ; mais les principales portent le cachet indiqué ; elles sont toujours par plaques qui se joignent en se recouvrant les unes les autres, comme font les tuiles.

Nous nous contenterons de les désigner par le nom des places qu’elles occupent ou des fonctions qu’elles remplissent, sans nous embrouiller dans des noms scientifiques, et nous renverrons aux gravures[1] qui les feront facilement reconnaître (grav. 56, 57, 58 et 59).

A. Les supérieures de la tête sont très-petites dans les espèces non huppées ; elles entourent le crâne.

B. Les inférieures de la tête sont presque à l’état de poils ; elles garnissent les joues et l’intervalle qui sépare les barbillons.

C. Les supérieures et les postérieures du cou, petites et allongées par en haut, s’élargissent par en bas et forment ce qu’on appelle le camail. Elles se prolongent en arrière entre les deux épaules, où elles recouvrent le commencement de celles du dos et de la naissance des ailes.
Grav. 56. — Plumage d’une poule suspendue par les pattes et vue de dos.

D. Les antérieures du cou prennent du haut du cou jusqu’à la poitrine, dont elles recouvrent les premières plumes.

E. Celles du dos forment une espèce de plaque d’environ 0m.10. Ces plumes, quoique de la même nature que celles du cou, sont un peu plus grandes qu’elles ; elles recouvrent les plumes des reins.

F. Celles de la poitrine couvrent dans toute leur longueur les deux muscles pectoraux, en longeant le sternum à l’arête duquel elles viennent de chaque côté se rejoindre. Leur ensemble forme le plastron. Ces plumes recouvrent celles des flancs, conjointement avec les plumes des reins.

G. Les plumes des reins, grande plaque qui couvre les reins et les enveloppe en prenant du dos jusqu’au croupion, qu’elles dépassent pour recouvrir les plumes de la queue ; sur les côtés elles recouvrent le commencement des plumes des flancs, des cuisses et de l’abdomen.

H. Celles des flancs, plumes d’une nature légère et touffue. Elles recouvrent la partie supérieure des plumes des cuisses, et se glissent sous le plastron.

I. Celles de l’abdomen, qui couvrent et enveloppent toute cette partie, depuis le bout du sternum jusqu’au croupion. Ces plumes sont ordinairement touffues, d’une nature soyeuse, et s’étalent en houppe.

J. Les externes des cuisses recouvrent celles de l’abdomen et de la jambe ou pilon.

K. Les internes des cuisses sont aplaties et d’une nature soyeuse.

L. Les externes et les internes de la jambe ou pilon, qui s’arrêtent au calcanéum, ou, si l’on veut, à l’articulation du canon de la patte. Dans certaines espèces, elles le dépassent peu ou beaucoup et forment des prolonges qu’on appelle manchettes.

M. Celles des pattes ou du canon, longues, courtes ou absentes dans les différentes races. Ces plumes longent le canon au nombre d’une ou plusieurs rangées ; elles sont toujours à la partie externe.

N. Celles des doigts apparaissent sur les côtés externes.

0. Les moyennes caudales, qui enveloppent le croupion et recouvrent les grandes plumes de la queue.

P. Les grandes caudales, qui sortent en une rangée régulière de sept de chaque côté du croupion, et forment la queue.

Q. Les externes du bras poussent sur la peau qui enveloppe le bras ou humérus, et recouvrent une partie des autres plumes de l’aile. Elles forment l’épaule. Il serait facile de se tromper sur le compte de ces plumes si l’on n’ouvrait bien l’aile pour les observer ; ce sont les plus rapprochées du corps ; elles sont réunies en bouquet.

R. Les internes du bras, plumes petites, rares et grêles.

S. Les grandes de l’avant-bras, qui forment, ouvertes, une grande surface bombée, et sont de différentes dimensions. Ces plumes poussent au bord inférieur de l’avant-bras ; elles sont en partie recouvertes par :

T. Les moyennes externes de l’avant-bras. Ces plumes sont de différentes dimensions ; elles sortent de la peau de toute la surface extérieure formée par le radius et le cubitus, et de la grande partie membraneuse qui va du bras à l’avant-bras. Elles commencent toutes petites vers le bord supérieur, et se terminent assez grandes à l’inférieur.

U. Les internes de l’avant-bras, plumes serrées, moyennes et petites, qui recouvrent les grandes de l’avant-bras à leur naissance.

V. Les grandes du vol, ou plumes de la main ; assemblage de grandes plumes fortes qui sert le plus à l’oiseau dans la locomotion ; elles sortent du bord inférieur de ce qu’on appelle le bout de l’aile.

X. Les externes du vol, qui recouvrent les grandes ; ces plumes sont roides et bien aplaties sur les autres.

Y. Les internes du vol, plumes petites et moyennes qui recouvrent la naissance des plumes du vol.

Z. Un appendice, appelé pommeau de l’aile, qui représente la partie digitée et se trouve placé à l’articulation de l’ avant-bras et de la main, porte quelques plumes moyennes de la nature des grandes de la main et quelques petites de recouvrement. Ces plumes jouent un rôle dans le vol.
Grav. 57. — Plumage d’une poule suspendue par les pattes et vue sous le ventre.

Quand l’aile entière est ployée, presque tout se trouve, à peu de chose près, caché par les grandes plumes de l’avant-bras, et surtout par les moyennes de recouvrement.

Les divisions des plumes sont les mêmes chez le coq que chez, la poule ; mais les formes de quelques-unes d’entre elles sont différentes.
Grav. 58. — Plumes de l’aile, face externe.


Chez le coq, les plumes qui constituent le camail sont fines,
Grav. 59. — Plumes de l’aile, face interne.

ténues, pointues, allongées, s’étalent comme une crinière jusque sur les épaules, et recouvrent une partie du plastron et des plumes antérieures du cou.

Celles du dos leur font suite et affectent un peu les mêmes formes.

Celles des reins sont dans le même cas, et elles viennent, en s’allongeant au fur et à mesure qu’elles s’approchent du croupion, cacher l’abdomen et inonder les cuisses d’un faisceau de lancettes pendantes.

Les plumes moyennes de recouvrement des ailes, sans être pointues, participent de cette nature. Les plumes moyennes de recouvrement de la queue changent complètement de forme et de dimension, puisque chez le coq elles deviennent les plus grandes. Elles sont de différentes proportions, et affectent toutes la forme demi-circulaire et retombante ; les deux plus grandes se nomment grandes faucilles ; les autres se nomment moyennes et petites faucilles. Les grandes plumes qui constituent la queue chez les poules existent aussi longues chez le coq, mais disparaissent à peu près sous l’abondance et le luxe des faucilles.

On trouve de plus, réunis ou isolés, dans certaines espèces, différents assemblages de plumes, dont la désignation suit :

Huppe. Touffe considérable de plumes longues, tantôt pointues ou arrondies, tantôt droites ou retombantes, posées sur le sommet du crâne et affectant différentes dispositions suivant la race.

Demi-huppe. Composée des mêmes éléments, mais moitié moins forte que la huppe entière.

Épis. Petite touffe de plumes courtes, ténues, droites ou un peu retombantes, occupant la même place.

Favoris. Touffe de petites plumes pointues ou arrondies, ordinairement retroussées, qui entourent la joue.

Cravate ou jabot. Touffe de plumes plus ou moins longues et pendantes, qui partent de dessous le bec et descendent le long du cou plus ou moins bas.

Collier. Touffe de plumes retroussées, qui entourent les joues et passent en se rejoignant par-dessous le bec.

Une variété inouïe de couleurs et de dessins appartenant à chaque race, augmentée de toutes les combinaisons survenues dans les croisements, ferait de la connaissance des différents plumages une étude interminable. Cependant, avec de la patience, on peut se faire facilement une idée de la robe d’une espèce, en examinant isolément une plume de chaque région du corps. On ne trouvera jamais, il est vrai, une plume identiquement semblable dans les détails à celle qu’on aura prise pour modèle, attendu que la nature, toujours occupée de doter chaque chose d’une personnalité qui lui appartienne, ne fait jamais deux objets absolument pareils ; mais on retrouve dans les plumes d’une même région une analogie qui constitue dans l’ensemble une régularité, une conformité charmantes, dont cependant la différence insaisissable exclut l’idée d’une fabrication mécanique. — C’est ce qui donne la vie aux belles productions artistiques ; c’est ce qui constitue le côté pittoresque des armes, des meubles, de tous les ustensiles d’autrefois, où l’on retrouve la main de l’homme ; c’est ce qui fait l’individualité dont manque aujourd’hui tout ce qui ne peut se débarrasser des étreintes de l’industrie. — Nous donnerons en son lieu et place le dessin de la plume qui caractérise chaque région, et cela nous servira à décrire plus clairement l’aspect général des espèces et de leurs variétés.

C’est une des particularités qui distinguent les espèces de luxe ou d’agrément, que le plumage soit ordinairement bien plus éclatant et plus varié chez la poule que chez le coq, tandis que c’est le contraire qui a lieu dans les espèces destinées à la consommation. Aussi commencerons-nous, chez les premières, par décrire celui de la poule avant celui du coq, tandis que chez les autres nous procéderons par la voie opposée.



  1. On remarquera que les lettres de renvoi correspondent à celles des quatre gravures, de sorte que, lorsqu’un détail est peu intelligible sur l’une, il est aussitôt éclairci sur l’autre.