Le Poème sans nomBibliothèque-Charpentier (p. 34).
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XIX


Quand nous gisions l’un contre l’autre, abasourdis
Par le choc fulgurant du spasme génésique,
Souvent, ta voix, plus douce alors qu’une musique,
Murmurait : « C’est le ciel !… N’est-ce pas le ciel, dis ? »

Extasiés, nous répétions, tout engourdis,
Ce mot prépondérant de l’amoureux lexique,
Par quoi nous révélions, si bassement physique,
L’idée humaine qu’on se fait du paradis.

Certes… Mais cette idée, après tout, quand j’y songe,
Ne sort peut-être pas tout à fait d’un mensonge…
À la minute où nous croyons toucher le ciel,

Le corps ne sent il pas ce que l’âme devine ?
Et, dans cet instant-là, tout de flamme et de miel,
Voyons-nous pas vraiment la lumière divine ?