Le Livre pour toi/Les branches abaissées des coudres



IX


Les branches abaissées des coudres versent une ombre fine à ton visage épanoui.

Tu ris sous mes dents et ton rire me fait vibrer jusqu’aux talons ; sa juvénile insolence amuse mes nerfs et glisse dans ma bouche entr’ouverte un chatouillement.

Tu ris, parce que j’appuie mon coude sur ta poitrine d’un air vainqueur et que tes deux épaules touchent la terre.

Tu ris, parce que tu sais que tes mains tendues me soulèveraient sans effort pour me lancer, comme une baguette de saule, dans le foin gris ; parce que tes bras font de moi un jouet que ton caprice roule sur l’herbe douce où se détendent les sauterelles en jade vert.

Tu ris de ma faiblesse, de mes doigts frêles, de mes poignets souples que tu fais craquer, et pourtant, Sylvius, ne t’ai-je pas vaincu ?

N’ai-je pas vu ta tête éperdue vaciller et retomber dans mes cheveux ?

Alors tu ne riais pas.