Le Livre des sonnets/Les vieillards, quand près d’eux, semaine par semaine


Les Ruines




Les vieillards, quand près d’eux, ſemaine par ſemaine.
Le temps a dévaſté, tour à tour, fleurs & fruits,
Les vieillards ont, ainſi que la cité romaine,
Au cœur un forum, mort plein de temples détruits ;

Silencieux déſert où leur âme promène
Son long ennui ſtérile, où l’ortie & le buis,
Et l’herbe ſolitaire, en l’antique domaine,
Ont étouffé l’orgueil des faſtes & des bruits ;

Où des frontons muets la légende effacée
Sous la rouille des ans dérobe ſa penſée.
Plus de chants, les oiſeaux aiment les floraiſons ;

Plus de priſme charmeur iriſant les bruines ;
Mais de graves ſoleils, de vaſtes horizons,
Éclairant la beauté dernière des ruines.


Jules Breton.